La charte, signée à Kampala, la capitale de l’Ouganda, le 6 janvier, appelle les partis à unir leurs efforts pour renverser le régime par « des moyens pacifiques, civils et démocratiques » ou « une lutte révolutionnaire armée ».
Parmi les signataires figurent les principaux partis politiques d’opposition placés sous la bannière des Forces du consensus national (National Consensus Forces, NCF), une coalition de groupes d’opposition armés appelés Front révolutionnaire du Soudan et plusieurs groupes de femmes et de jeunes.
À leur arrivée à Khartoum, cinq représentants politiques et militants - Jamal Idris, dirigeant du Parti unioniste nassérien ; Intisar al-Agli, membre du Parti unioniste nassérien et militante des droits des femmes ; Abdulrrahim Abdullah, Muhammed Zain Ala’abdeen et Hisham Almufti du Parti unioniste démocratique – ont été arrêtés. Le gouvernement les a qualifiés de « traitres ».
Le 14 janvier, à Khartoum, des officiers de la sécurité ont arrêté Abdul Aziz Khalid, président du bureau exécutif du parti d’opposition de l’Alliance nationale pour avoir signé la Charte de l’aube nouvelle.
Critiques cinglantes
Les responsables gouvernementaux ont vivement critiqué l’accord et les signataires et ont appelé les imams à dénoncer cette charte, qualifiée d’œuvre d’infidèles, dans leurs sermons.
Dans un discours prononcé lors d’une cérémonie de remise des diplômes aux membres du groupe paramilitaire des Forces de défense populaire (Popular Defence Forces), Nafie Ali Nafie, conseiller du président soudanais et vice-président du Parti du congrès national (PCN), le parti au pouvoir, a dit, « Les membres de l’opposition sont des traitres, car ils ont collaboré avec les rebelles pour renverser le régime et qu’ils ont promis d’établir un système laïc ».
Qualifiant l’accord de « fausse alarme », il a indiqué que le gouvernement préparait « une action décisive » contre les signataires.
Selon les journaux soudanais, le Vice-président Al-Haj Adam Yousif a menacé d’empêcher les partis d’opposition de poursuivre leurs activités politiques s’ils ne rejetaient pas la charte.
À l’occasion de l’ouverture d’un nouveau complexe religieux dans l’État de Gezira, le président Bashir a déclaré, « Aucun parti politique collaborant avec les groupes rebelles ne sera autorisé à poursuivre des activités politiques dans le pays ».
Depuis les arrestations et les déclarations du gouvernement, plusieurs représentants politiques de l’opposition se sont démarqués de l’accord dans l’espoir d’échapper aux répressions.
L’opposition locale et les groupes de défense des droits de l’homme ont vivement critiqué les arrestations, qualifiées d’anticonstitutionnelles et de violations de la liberté d’expression. La Coalition des femmes politiques a déclaré, « Nous ... condamnons fermement l’arrestation d’Intisar al-Agli, dirigeante de la coalition, qui a été appréhendée une nuit, dans une rue, sans égard pour le caractère sacré des femmes soudanaises ».
La coalition a indiqué que les officiers de sécurité ont arrêté la voiture de Mme al-Agli et l’ont emmenée à leur bureau, sans qu’aucune raison ne lui ait été donnée ; l’organisation réclame sa remise en liberté immédiate et sans condition.
« Les techniques adoptées par le Parti du congrès national pour durcir son action... et ses [Bashir] efforts pour miner et maltraiter l’opposition politique ont joué un rôle dans la signature de la "Charte de l’aube nouvelle", selon les leaders de l’opposition », a indiqué un communiqué du Réseau arabe d'information sur les droits de la personne. « L’arrestation des leaders partisans sans mandat d’arrêt et sans motif, leur emprisonnement dans un endroit inconnu et le non-respect de leurs droits naturels … constituent de graves violations des normes internationales relatives au traitement des détenus ».
Répétition
Les répressions actuelles sont identiques aux restrictions auparavant infligées aux groupes qui critiquaient le gouvernement. En décembre 2012, quatre groupes de la société civile ont été obligés de suspendre leurs activités, dont le Centre d’études soudanais et le Centre Khatim Adlan pour l’instruction et le développement humain. En 2011, le gouvernement a été vivement critiqué suite aux accusations selon lesquelles des responsables de la sécurité avaient agressé sexuellement et torturé des manifestants qui avaient participé à des manifestations anti-gouvernementales à Khartoum et dans d’autres villes soudanaises.
La Coalition des organisations de la société civile soudanaise et la Campagne pour la défense de la liberté d’expression et de publication ont appelé M. Bashir à intervenir pour protéger leurs droits et à abroger les décisions arbitraires et les actions prises à leur encontre. Dans un mémo intitulé « Memorandum on Attacks on Civil Society Organisations », ils ont également réclamé le retrait des restrictions illégales sur les médias, de la censure de la presse, de la mise sous séquestre des journaux et l’arrêt du harcèlement des journalistes.
Human Rights Watch a également demandé au Soudan d’« autoriser les groupes indépendants à intervenir librement et à conduire des manifestations pacifiques ».
« Le Soudan devrait annuler les mesures draconiennes prises à l’encontre des groupes de la société civile et les acteurs internationaux devraient condamner ces mesures officiellement », a indiqué Daniel Bekele, directeur de la division Afrique à Human Rights Watch, dans une déclaration en date du 13 janvier. « La campagne menée par le gouvernement contre les organisations de la société civile soudanaise semble avoir pour objectif de réprimer la diversité, les droits de l’homme et le dialogue sur les questions importantes plutôt que de servir un objectif légitime ».
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