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L’aide humanitaire perturbée en Syrie

Damascus' Old Market on a quiet Friday. Sanctions and insecurity have hit the Syrian economy hard Heba Aly/IRIN
Les organisations d’aide humanitaire et d’aide au développement présentes en Syrie affirment que les sanctions internationales imposées au pays nuisent à leurs opérations.

En août dernier, la section italienne de l’organisation non gouvernementale (ONG) Terres des Hommes (TDH) a envoyé sa demande habituelle de transfert financier depuis l’Europe pour son intervention en Syrie.

L’ONG a ensuite attendu. Attendu. Attendu.

Après 15 jours de retard, TDH a contacté sa banque en Italie, qui l’a informé que le transfert avait été refusé.

« Transférer de l’argent de l’Europe vers la Syrie est un désastre », a dit Emanuela Rizzo, représentante de TDH dans le pays. La banque exigeait de TDH une longue liste de documents, dont sa convention avec le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA), le mémorandum d’entente passé avec le Croissant-Rouge arabe syrien, une lettre promettant de ne financer aucun groupe « terroriste » et une liste de ses partenaires d’exécution.

Deux mois et 200 euros (267 dollars) de frais administratifs plus tard, TDH est parvenu à transférer l’argent par le biais d’une autre banque italienne qui détenait une filiale en Syrie. « Mais cela devient incroyablement difficile », a dit Mme Rizzo à IRIN.

D’autres organisations d’aide humanitaire qui rencontrent le même genre de difficultés pour transférer de l’argent ont trouvé une autre solution : elles effectuent un virement vers une banque au Liban et traversent la frontière pour aller le chercher. Les réseaux de solidarité sociale doivent recourir au même stratagème.

Depuis le début de la crise syrienne en 2011, les États-Unis, l’Union européenne, la Turquie et la Ligue des États arabes, entre autres, ont imposé une série de sanctions à la Syrie. Ces sanctions visent les secteurs bancaire, pétrolier, énergétique et de l’armement, ainsi que certains individus. L’objectif affirmé était, dans un premier temps, de mettre fin à la répression des manifestations par l’État puis, dans un deuxième temps, d’affaiblir le gouvernement.

« Des répercussions économiques importantes »

Or, comme l’a souligné un rapport de l’Institut danois d’études internationales en 2012, « le régime de sanctions a eu des répercussions économiques importantes au-delà de l’État et du gouvernement syrien ».

Les sanctions ont entraîné des « effets secondaires » : accroissement de l’inflation, hausse du prix des carburants et des denrées alimentaires, entraves à l’importation, augmentation du chômage, baisse des niveaux de salaire et diminution du pouvoir d’achat, notamment en matière d’alimentation. Elles ont donc « alourdi le coût socioéconomique du conflit et vont vraisemblablement exacerber les difficultés socioéconomiques préexistantes et toucher principalement les couches les plus pauvres de la population », a averti le rapport.

Bien que les sanctions ne s’appliquent pas à l’aide humanitaire, les organisations affirment être indirectement touchées, comme la plupart des Syriens. Il leur est en effet plus difficile et plus couteux de trouver le matériel nécessaire à leurs interventions.

Les usines ont du mal à importer des matières premières, car les sanctions limitent les transactions bancaires et contribuent à la dépréciation rapide de la livre syrienne et parce que l’insécurité entrave l’approvisionnement. De nombreux fournisseurs qui travaillaient pour les organisations humanitaires ont donc fermé.

Au début du conflit, en mars 2011 (peu avant le premier train de sanctions de mai 2011), le taux de change était de 47 livres syriennes pour un dollar. Actuellement, le dollar vaut 76 livres selon le cours officiel et 88 sur le marché noir, où le taux a même parfois dépassé les 100 livres pour un dollar.

Avant la crise syrienne, 26 usines de fabrication de couches et d’autres produits d’hygiène étaient enregistrées auprès de la Chambre de commerce de Damas. Mais lorsque TDH a lancé un appel d’offres en octobre, seulement quatre d’entre elles étaient encore ouvertes et l’organisation n’a reçu qu’une proposition d’un fabricant, qui ne pouvait même pas fournir la quantité nécessaire.

« Pour eux, ce n’était pas faisable du tout », a dit Mme Rizzo. Quatre projets visant à venir en aide à plus de 4 000 personnes ont donc été reportés de deux mois.

« Les prix ont tellement augmenté », a ajouté Louisa Seferis, coordinatrice des secours d’urgence pour le Conseil danois pour les réfugiés (CDR) en Syrie.

Cette ONG est elle aussi touchée par la pénurie. Auparavant, elle distribuait des vêtements d’hiver provenant d’une usine d’Alep qui pouvait produire 10 000 pièces par jour. Mme Seferis a désormais du mal à en obtenir 15 000 par semaine, fournies par plusieurs usines.

D’autres organisations ont dû commencer à importer des produits à un prix plus élevé et avec un temps d’attente plus long.

Selon Radhouane Nouicer, coordinateur humanitaire à Damas, la multiplication des pénuries de carburant, la hausse des prix et l’augmentation de l’insécurité sur les routes poussent les transporteurs à vendre plus cher leurs services de transport d’articles humanitaires.

Les fournisseurs sont également moins patients et plus tatillons concernant le paiement.

« L’approvisionnement est devenu une véritable pierre d’achoppement », a dit un travailleur humanitaire qui a souhaité garder l’anonymat. « Tous les fournisseurs présentent des devis qui ne sont pas valables plus de dix jours. Vous avez dix jours pour conclure le marché et payer le prix exigé. Tous les fournisseurs veulent recevoir l’argent immédiatement. Or les transactions nous prennent du temps. Les gens ne peuvent plus attendre les paiements comme avant. »

Les opérations du PAM également touchées

Le Programme alimentaire mondial (PAM), qui a besoin de 12 000 litres de carburant par jour pour ses opérations, a été touché par une grave pénurie de carburant. L’agence a donc été obligée de négocier avec le gouvernement la permission d’importer du carburant pour ses activités humanitaires. Cette permission lui a été accordée.

Le PAM se procurait déjà une grande partie de ses denrées alimentaires à l’étranger. Mais, avec la hausse des prix sur le marché local, l’agence s’est tournée encore davantage vers les fournisseurs internationaux, et ce pour deux raisons : il est devenu économiquement plus avantageux d’importer et acheter de telles quantités localement tirerait encore davantage les prix des denrées alimentaires vers le haut.

Plus grave encore, selon M. Nouicer, les sanctions ont multiplié les besoins humanitaires dans le pays, ce qui vient accroître la charge de travail des organisations humanitaires.

De nombreuses personnes n’ont plus les moyens de se procurer des médicaments ou du combustible pour chauffer leur maison. D’autres ont perdu leur emploi et dépendent désormais de l’aide.

« Les sanctions sur les secteurs bancaire et énergétique affectent toute la population d’un pays », a dit M. Nouicer.

ha/cb-ld/amz


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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