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Les donateurs poursuivent leurs efforts d’aide malgré les sanctions

Medicines at a health centre in Ankavandra, about 230km west of the Madagascan capital Antananarivo Guy Oliver/IRIN
Medicines at a health centre in Ankavandra, about 230km west of the Madagascan capital Antananarivo
Après deux ans de crise politique, Madagascar semble enfin faire des progrès vers la restauration de la démocratie. Un nouveau Premier ministre a été nommé, et des élections seront organisées en 2012. Les donateurs qui ont suspendu leur aide à cet État insulaire très pauvre suivent ces développements avec attention.

« Je pense que les choses ne changeront pas tant que les Malgaches ne montreront pas qu’ils entament cette transition avec sérieux », a dit Rudolph Thomas, le directeur de la mission de l’Agence américaine pour le développement international (USAID) à Madagascar. Il a par ailleurs souligné la nécessité pour le pays d’organiser des élections libres, justes et transparentes.

Après le renversement du président Marc Ravalomanana par Andry Rajoelina en 2009, un renversement qui a été qualifié de coup d’État, nombre de donateurs étrangers ont décidé de suspendre tous leurs programmes à l’exception de l’aide d’urgence au pays. L’Union européenne (UE) a ainsi suspendu ses programmes et gelé l’aide au développement acheminée par le gouvernement.

Les États-Unis ont quant à eux exclu Madagascar de l’African Growth and Opportunities Act (AGOA, loi sur la croissance et les possibilités économiques en Afrique), qui est un accord de commerce préférentiel, et ont renoncé à faire de Madagascar le premier bénéficiaire de leur agence d’aide bilatérale, la Millennium Challenge Corporation (MCC).

Nombre de travailleurs humanitaires s’attendaient à ce que les sanctions soient temporaires, tout comme la crise. « Dès le début, nous avons dû nous exprimer clairement contre le coup d’État », a dit M. Thomas. « Nous aurions donné l’impression de l’approuver si nous n’avions rien dit ».

Plus de deux ans après les faits, M. Rajoelina est toujours au pouvoir et les sanctions sont maintenues. Les conséquences ont été désastreuses dans ce pays dont le budget national dépend à 70 pour cent de l’aide étrangère. Les travaux sur les infrastructures et sur la protection de l’environnement ont été interrompus, les exportations ont été divisées par deux suite à la suspension de l’AGOA, et au moins 50 000 personnes, pour la plupart des travailleurs de l’industrie du textile, ont perdu leur emploi.

La prudence s’impose

Lors de sa visite à Madagascar en juillet 2011, Olivier de Schutter, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à l'alimentation, a indiqué que « tous les indicateurs de la sécurité alimentaire sont au rouge » et que l’insécurité alimentaire concernait au moins la moitié de la population. Le fait que le pays présente un taux de malnutrition infantile parmi les plus élevés au monde l’a conduit à demander à la communauté internationale de reconsidérer les sanctions.

Les donateurs restent toutefois prudents. Certains programmes ont été menés à terme, mais rares sont ceux qui ont été renouvelés. En 2010, la Coopération suisse au développement (SDC) a, par exemple, décidé de mettre fin à ses activités à Madagascar. Certains programmes continueront d’être financés, mais son programme d’appui au développement rural, SAHA (Sahan'Asa Hampandrosoana ny eny Ambanivohitra), prendra fin en 2012.

« Il arrive toujours un moment où les donateurs pensent qu’ils en ont fait suffisamment et c’est valable pour tous les programmes. Le programme SAHA a atteint son objectif dans l’ensemble, bien que le processus de développement ... ne soit pas fini, bien sûr. Le suivi et l’extension des travaux seront assurés par des organisations non gouvernementales (ONG) partenaires », a dit Nicolette Matthijsen d’Helvetas Swiss Intercooperation, une ONG suisse spécialisée dans le développement agricole et la bonne gouvernance, qui met en œuvre le programme SAHA.

L’aide au gouvernement est toujours suspendue, mais nombre d’ONG indiquent qu’elles ont augmenté leurs budgets en réponse à l’aggravation de la situation humanitaire à Madagascar. Les dépenses de l’USAID ont augmenté, passant de 57 millions de dollars en 2008 à plus de 80 millions de dollars en 2010. « Depuis la crise, nous faisons davantage et nous sommes aujourd’hui le donateur bilatéral le plus important », a dit M. Thomas.

Collectes de fonds indépendantes

L’Inter-church Organization for Development (ICCO), une organisation basée aux Pays-Bas et qui soutient le programme de réforme agraire de Madagascar, l’un des projets qui devraient bénéficier du soutien de la Millennium Challenge Corporation américaine, a également étendu son programme.

« Nous collectons des fonds nous-mêmes, donc bien que nous recevions moins d’argent de la part du gouvernement des Pays-Bas, nous avons réussi à multiplier notre budget par deux ici, à Madagascar », a dit Peter Egging de l’ICCO.

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Il a souligné que le retrait de la Millennium Challenge Cooperation avait « coupé les vivres » au programme de réforme agraire national, dont certaines sections ont dû être fermées, mais que plusieurs organisations, dont l’ICCO, avaient accru leur soutien et que le programme de réforme agraire était désormais mis en œuvre dans 30 municipalités.

Alors que les dépenses publiques dans les secteurs de la santé et de l’éducation diminuaient pendant la crise, les organisations humanitaires sont intervenues afin d’assurer le bon fonctionnement des services sociaux. Ainsi, lorsque le budget de l’éducation est passé de 82 millions de dollars à à peine plus de 14 millions de dollars, l’UNICEF a débloqué 37 millions de dollars afin de payer les salaires des enseignants et de financer les écoles. L’agence a fourni une aide similaire au secteur de la santé après la fermeture de 214 centres médicaux au début de l’année 2011, principalement en raison d’un manque de personnel.

« Suite à la crise, l’aide au développement a été gelée et les financements ont été perdus », a dit Bruno Maes, le représentant de l’UNICEF à Madagascar. « L’UNICEF a toutefois réussi à assurer un niveau de financement suffisant pour protéger les enfants des écoles primaires des effets négatifs de la crise ».

Suite à l’application des sanctions, les organisations humanitaires ont dû trouver un juste équilibre dans leur collaboration avec les autorités. « En général, les organisations de donateurs acceptent de collaborer avec les ministères au niveau technique. D’un autre côté, une institution comme l’UE n’est pas autorisée à financer les projets de développement des communes dont le PDS [président de la Délégation spéciale – dirigeant régional] a été nommé par le gouvernement, si l’organisme d’exécution est amené à collaborer avec lui en raison de la nature du travail », a dit M. Egging.

Trouver des fonds supplémentaires

Certaines agences humanitaires ont vu leur budget augmenter grâce aux programmes internationaux existants. Les augmentations du budget de l’USAID, par exemple, sont principalement liées à l’Initiative du Président contre le Paludisme (PMI), qui est mise en œuvre dans 15 pays africains dont Madagascar. De la même manière, le Service d’aide humanitaire de la Commission européenne a fourni des financements par le biais de son programme international de préparation aux catastrophes.

Les ONG se tournent quant à elles vers le secteur privé dans l’espoir d’obtenir des financements ou de l’aide. Les sociétés de télécommunication, par exemple, fournissent des lignes d’assistance téléphonique gratuites à l’UNICEF, tandis que des fabriques de ciment ont fait don de matériaux de construction. En échange, l’UNICEF aide ces sociétés à mettre en œuvre des pratiques de fonctionnement adaptées aux besoins des enfants.

« Il y a diverses façons de trouver de l’argent. Nous disposons d’un fond mis en place par une commune suisse, qui nous permet d’apporter de l’aide à un projet pour les enfants des rues. Si vous avez un bon projet, vous trouverez de l’argent », a dit Mme. Matthijsen.

Certaines organisations ont contourné les sanctions en injectant leurs fonds directement dans les projets. M. Maes a dit que l’UNICEF avait réussi à maintenir des services éducatifs de base pendant la crise « en ciblant les bénéficiaires directement ».

Cette approche est souvent efficace, mais elle risque de ne pas être viable à long terme. « Il faut travailler avec les autorités quand on veut étendre ses projets », a dit Mme. Matthijsen.

Un programme SAHA visant à promouvoir la culture de la patate douce, un aliment nutritif considéré par les Malgaches comme un aliment réservé aux plus pauvres, n’a remporté de succès qu’après l’intervention de l’office national de nutrition qui a sensibilisé la population à l’intérêt de culture de la patate douce. Les fermiers ont alors commencé à en cultiver et à en consommer.

Comme Mme. Matthijsen l’indique, « Un gouvernement peut dire : "Tout le monde doit faire cela". Nous qui mettons en œuvre des projets, nous ne pouvons pas faire ça ».

ar/ks/he-mg/amz


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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