Paul vit à Abobo, un quartier que des milliers de personnes ont fui durant ces derniers jours à cause d’intenses combats entres les forces loyales à Laurent Gbagbo et les groupes armés soutenant Alassane Ouattara.
« Quand on voit de la fumée, on pense que peut-être les gens sont en train de s’occuper des cadavres… Un jour, il y avait un corps devant ma propre porte. Nous l’avons mis dans un endroit isolé jusqu’à ce qu’il puisse être brûlé. Les pompes funèbres ne prennent pas les corps qui sont déjà en train de se décomposer, alors les gens de la communauté incinèrent les cadavres pour éliminer l’odeur et surtout le risque de maladie.
« Les gens brûlent des pneus avec les cadavres pour neutraliser l’odeur un peu. C’est complètement sans cérémonie, bien sûr. Il n’ya pas de temps pour parler ou faire une prière ; avec la peur que tout le monde a au ventre, les gens doivent faire [le travail] très rapidement et rentrer [chez eux].
« Les gens perdent des êtres chers, sans jamais revoir une trace de leur corps – personne n’a le temps de circuler [pour] identifier les corps.
« Je me demande, quand est-ce que la communauté internationale va prêter attention à la catastrophe qui se déroule dans ce pays ?
« Le monde entier se penche sur la question de la Libye, de l’Egypte [et] de la Tunisie. Il ne faut pas qu’on oublie la Côte d’Ivoire. C’est le même sang qui coule dans nos veines.
« On ne sait même plus vers qui nous tourner.
« Pour ceux qui restent à Abobo, il n’y a presque plus de nourriture ni de médicaments. Les véhicules ne circulent plus. Les boutiques sont fermées ; leurs propriétaires craignent le pillage.
« Un jour, une ONG a essayé de venir nous aider, mais ils ont été bloqués par les forces de sécurité.
« C’est presque impossible de quitter actuellement, ou même d’aller d’un quartier à un autre ; il y a des hommes armés à des barrages improvisés partout. Ils demandent votre nom, ils vous volent tout ce que vous avez, ils vous tabassent.
« Les Nations Unies et les organisations régionales doivent faire quelque chose pour sauver le pays. Aucun Ivoirien éminent ne peut maintenant se lever et dire : ‘Je ne suis pas pour le dirigeant X ou Y - il faut simplement que nous mettions fin à la violence pour sauver la Côte d’Ivoire’. Cela serait trop dangereux, parce qu’aujourd’hui tout le monde est radicalement d’un côté ou de l’autre.
« Je supplie les deux camps de s’occuper de la catastrophe humanitaire et sécuritaire auquel fait face la population, et ensuite de s’attaquer aux problèmes politiques ».
*nom d’emprunt
np/cb-sk/amz
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