Ces derniers temps, d’après Alphonse Ndakengerwa, chirurgien au King Faisal Hospital à Kigali, la capitale, les cliniques de la ville ont été submergées de demandes de circoncision ; cela s’explique en grande partie par les diverses recherches, reprises par les médias, qui font état d’une réduction du risque de transmission du VIH chez les hommes circoncis.
Les résultats de trois essais cliniques contrôlés randomisés, réalisés au Kenya, en Afrique du Sud et en Ouganda ont en effet permis de conclure que la circoncision pouvait considérablement réduire le risque de transmission du VIH par contact sexuel chez l’homme.
Dans la culture rwandaise, la circoncision des hommes et des garçons n’est pas pratiquée en guise de rite initiatique, comme c’est le cas dans d’autres cultures africaines, et bien que des informations officieuses aient circulé au sein de la population, rares sont ceux qui comprennent bien les avantages et les risques d’une telle intervention.
« Moi, je pense que quand on se fait circoncire, c’est comme un préservatif invisible », a déclaré Ignace Hategekimana, 27 ans, un étudiant de Kigali circoncis récemment. « Ca réduit les risques d’attraper des infections ».
Antoine Rwego, expert de la circoncision au Centre de traitement et de recherche sur le sida (TRAC) du Rwanda, a expliqué à IRIN/PlusNews que de nombreux Rwandais risquaient d’envisager la circoncision comme le substitut du préservatif.
« Si nous ne véhiculons pas le bon message, nous risquons d’augmenter le risque de transmission du VIH », a-t-il indiqué à IRIN/PlusNews.
Une fausse idée généralisée de la circoncision
M. Rwego s’inquiète en particulier de la croyance, partagée par bon nombre de jeunes hommes, selon laquelle la circoncision permettrait aux hommes d’améliorer leurs prouesses sexuelles et les immuniserait totalement contre les infections sexuellement transmissibles, une préoccupation justifiée par les commentaires de M. Hategekimana.
« Avant d’aller à l’hôpital, j’ai parlé à plein d’amis et ils m’ont dit que c’était une bonne chose... sans le prépuce, on sent bien le sexe. Quand on s’est fait circoncire, on ne peut pas se blesser en ayant des rapports », a-t-il confié à IRIN/PlusNews.
Le docteur Stephenson Musime, chirurgien au King Faisal Hospital partage l’avis de M. Rwego. « Certaines personnes ont l’impression que cela augmente la virilité... un très grand nombre de gens pensent que cela les rendra plus forts et que cela augmentera leur énergie sexuelle », a-t-il expliqué.
« Pour les personnes circoncises, c’est une protection, dans une certaine mesure... mais cela ne veut pas dire qu’elles sont protégées à 100 pour cent : à elle seule, la circoncision ne permet pas de prévenir la transmission du VIH ; elle doit s’accompagner d’autres méthodes de protection », a rappelé le docteur Musime.
Agripine Tunga, 40 ans, vient juste de donner naissance à son fils, au King Faisal Hospital ; elle tient un tout autre discours : « Pour moi, le lien, c’est qu’ils [les hommes circoncis] deviennent excités... Je ne veux pas que mon fils soit tellement porté sur le sexe ».
Des recherches ont été menées sur ces théories en 2008, au Kenya et en Ouganda. Selon les conclusions de ces deux études, les hommes circoncis font état d’une sensibilité pénienne accrue et d’une plus grande facilité à atteindre l’orgasme, mais selon les experts, rien ne prouve que l’intervention améliore bel et bien la performance ou les prouesses sexuelles.
Besoin urgent d’une stratégie de communication efficace
D’après les travailleurs de la santé, il est important que le public comprenne comment la circoncision protège les hommes des infections sexuellement transmissibles, et qu’il sache également que cette intervention n’est pas une garantie de protection.
« Les gens se font circoncire pour beaucoup de raisons... médicales, culturelles, religieuses... ils doivent aussi être conseillés », a préconisé M. Rwego. « Nous devons concevoir le bon message à transmettre à la population ».
Le gouvernement rwandais se lance actuellement dans une étude des connaissances, des attitudes et des pratiques (KAP) pour déterminer le degré de sensibilisation et d’information des populations sur la circoncision.
« Certains peuvent croire que la circoncision offre une protection totale, comme un préservatif invisible, alors avec l’enquête KAP, nous saurons quoi dire aux gens et quel message faire passer », a expliqué M. Rwego. « Après cela, nous devrons définir des directives, former du personnel et acheter du matériel ».
Le gouvernement a commencé à déployer sa campagne de circoncision au sein de l’armée, en 2008, avant l’adoption générale de la mesure pour le reste de la population.
Au lancement de sa campagne nationale, le Conseil national rwandais de contrôle du sida commencera par proposer la circoncision pour les nouveaux-nés.
hh/kr/he/nh/ail
This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions