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Les experts du PAM optimistes, mais prudents

[Burkina Faso] Oudalan province, northern Burkina Faso, farmers at work. IRIN
The arid north disappoints; government moves west in search of water (file photo)
Confronté aux conséquences des catastrophes naturelles qui ont ravagé le Sahel l’année dernière, le Burkina Faso semble jusqu’ici avoir échappé à une crise alimentaire généralisée, mais le pays présente toutefois des poches de pénurie grave et il est impératif de rester vigilant, affirment les représentants des Nations unies et certains experts.

Selon plusieurs sources onusiennes, bien que la situation globale soit stable, il existe quelques zones à risque localisées, qui font l’objet d’une surveillance particulière de la part des autorités et des agences des Nations unies.

Plus alarmiste, l’une des organisations humanitaires internationales qui opèrent au Burkina Faso a même déclaré qu’un demi million de personnes devaient impérativement bénéficier d’une aide alimentaire d’urgence.

IRIN a pu s’adresser à plusieurs représentants du Programme alimentaire mondial (PAM) et du Réseau des systèmes d’alerte précoce contre la famine (FEWS NET), une organisation financée par les Etats-Unis. De retour d’une mission (la dernière en date) dans les zones les plus affectées par l’invasion acridienne et la sécheresse de 2004, ceux-ci ont expliqué que plusieurs facteurs avaient contribué à atténuer l’impact de la crise au Burkina Faso.

Les récoltes ayant été bonnes plusieurs années de suite, le Burkina Faso disposait de réserves alimentaires nationales pour aider les populations touchées dès le début de la crise, a déclaré mardi Kerren Hedlund, directrice adjointe du PAM.

Une mission a récemment été envoyée par le PAM dans la province de l’Oudalan, dans le nord du pays, près des frontières nigérienne et malienne.

« Les pluies ont commencé tôt. Tout est vert, les bêtes sont en très bonne santé et les vaches donnent du lait », a déclaré Mme Hedlund. Et d’ajouter que les services de santé constataient une stabilisation des taux de malnutrition, voire une diminution dans certaines régions.

Mais au Sahel, la situation alimentaire est toujours délicate, a-t-elle observé. C’est pourquoi il convient de rester extrêmement vigilant.

« Si les pluies s’arrêtent demain au Sahel, et ça peut arriver, ce sera un désastre », a-t-elle déclaré. « Certes, nous sommes mieux lotis, mais nous devons rester sur nos gardes jusqu’au mois d’octobre [date des prochaines récoltes]. C’est à ce moment-là que la situation se stabilisera ».

Le PAM et les autorités ont distribué de la nourriture aux populations les plus affectées par la destruction des cultures.

Le PAM, organisation d’aide alimentaire des Nations unies, a étendu son programme de cantines scolaires et distribue également des rations supplémentaires aux familles d’enfants sous-alimentés dans les centres médicaux.

Dans son rapport périodique de juillet 2005 sur la situation au Burkina, FEWS NET qualifiait le cas de l’Oudalan de « préoccupant ». En effet, les populations de cette province ne peuvent se procurer les céréales qui constituent leur alimentation de base, et les revenus des familles ne cessent de diminuer.

Toutefois, selon Jean Simpore de FEWS NET, la situation s’est améliorée au cours des dernières semaines. « Ca s’est stabilisé. Il y a plus de produits au marché et les prix baissent ».

D’après lui, cette baisse est due à la fois à l’intervention des organisations humanitaires, et à l’arrivée sur le marché de maïs importé de pays voisins et d’une céréale sauvage du Burkina. « Apparemment, ils vont réussir à éviter le pire ».

Mais les appels au secours des coopératives de paysans donnent un tout autre aperçu de la situation, selon Oxfam Intermon (Espagne), qui dirige les activités de l’organisation au Burkina Faso.

Selon l’organisation, au moins 500 000 habitants de la région sahélienne et de la zone centre-nord du pays auraient besoin d’une aide alimentaire. Ces régions abritent la majorité des Touaregs et des bergers traditionnels du Burkina.

« Pas un jour ne passe sans que les villageois de ces régions ne viennent nous dire qu’ils sont en difficulté et qu’ils ont besoin de notre aide », a expliqué Daouda Thiam, qui dirige les opérations humanitaires d’Oxfam au Burkina. « Le gouvernement dit qu’il n’y a pas de crise alimentaire, mais sur le terrain, la réalité est bien différente ».

Le gouvernement du Burkina a déclaré publiquement qu’il n’y avait pas d’urgence alimentaire généralisée et n’a pas lancé d’appel auprès de la communauté internationale pour obtenir une aide alimentaire globale.

Le chiffre communiqué par Oxfam provient d’une annonce officielle, diffusée par le gouvernement à la suite d’évaluations effectuées cette année. Toutefois, à en croire plusieurs sources onusiennes, les autorités ont simplement déclaré que 490 000 personnes étaient « affectées par » la destruction des cultures, sans faire d’autre commentaire.

Selon un représentant du Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA), certaines zones restent, de toute évidence, particulièrement vulnérables.

« Une situation globalement sous contrôle »

Les représentants des différentes agences des Nations unies, les autorités, les ONG et les associations locales doivent se réunir jeudi pour débattre de l’organisation, si besoin est, d’interventions d’urgence localisées. C’est ce qu’a expliqué Felix Alexandre Sanfo, responsable d’OCHA au Burkina Faso.

« La situation est globalement maîtrisée », a-t-il déclaré. « Mais cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de problèmes ».

D’après M. Sanfo, de plus en plus de Touaregs quittent le nord pour se rendre à Ouagadougou, la capitale.

Bien que les prix des vivres baissent dans certaines régions, dans beaucoup d’autres, le sac de 100 kg de mil, la céréale de base, se vend entre 25 000 et 35 000 francs CFA (entre 47 et 66 dollars américains), soit plus du double du prix pratiqué ces dernières années.

Les familles troquent 12 chèvres contre un seul sac de mil. L’année dernière, selon les travailleurs humanitaires, le même sac ne valait que quatre chèvres.

Karidja Sow, directrice d’une organisation agricole de femmes, a déclaré à IRIN qu’un membre de sa famille avait vendu 21 génisses cette année. Habituellement, il n’en vend que deux.

Cette année, les populations sont contraintes de vendre leurs bêtes à des prix tellement dérisoires que les Burkinabés parlent à présent de « la perte d’une bête » pour évoquer sa vente.

Au Burkina, où la prochaine présidentielle est prévue pour novembre, les membres de l’opposition dénoncent l’attitude des autorités, qui, selon eux, ferment les yeux sur une « famine » insidieuse.

Un groupe de politiciens de l’opposition a écrit une lettre ouverte au gouvernement, datée du 3 août et publiée dans le journal L’Observateur. Dans cette lettre, le groupe « dénonce le silence du gouvernement actuel face à la détresse des populations rurales et urbaines confrontées à la famine qui se propage aujourd’hui dans toutes les provinces du Burkina ».

Benewende Sankara, le président de l’Union pour la renaissance / Mouvement sankariste (UNIR/MS), un parti de l’opposition, a expliqué à IRIN que les populations burkinabées souffraient de part et d’autre du pays.

« Pour nous, la famine est bien réelle. Elle existe », a-t-il déclaré. « Lorsqu’on est en contact avec la population, on la voit. Les gens n’ont même pas de quoi s’acheter un sac de mil ».

Pour Sankara, il est temps de demander une aide alimentaire extérieure. « A l’heure actuelle, c’est la seule solution pour le Burkina Faso ».

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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