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Menace sur la promotion des préservatifs contre le sida

[Mozambique] Condom demonstration in Care microfinance project Supinho locality. IRIN
The condom remains taboo

Les activistes de la lutte contre le sida au Nigeria s’alarment des menaces qui pèsent sur les campagnes de promotion du préservatif, les autorités ayant accepté de limiter la publicité pour ce mode de prévention du VIH.

Ainsi, l’organe de régulation de la publicité du Nigeria, Apcon (Advertising Practitioners Council of Nigeria), chargé de vérifier la légalité des campagnes publicitaires diffusées dans le pays, a estimé fin février que la promotion du préservatif n’était pas conforme au Code nigérian des pratiques publicitaires et qu’elle devait être mieux réglementée.

Selon Emmanuel Ekuno, président du panel d’Apcon, les campagnes actuelles de promotion du préservatif sont contraires à l’article 4.39 (c), qui n’autorise pas la publicité du préservatif si elle est susceptible d’inciter les populations à adopter des comportements ‘indécents’.

Une nouvelle réglementation entrera donc en vigueur à partir du 1er juillet prochain, qui limitera les lieux et le contenu de ces publicités, a précisé Apcon.

Ces dernières années, les media nigérians se sont faits l’écho de nombreuses opérations publicitaires de promotion du préservatif pour tenter de freiner la propagation du virus dans un pays qui, avec près de quatre millions de personnes infectées, est le troisième au monde le plus touché par l’épidémie après l’Inde et l’Afrique du Sud.

A l’exception de plusieurs Etats du nord du pays à majorité musulmane régis par la Chariah, la loi islamique (qui considèrent le préservatif comme étant contraire à l’Islam), ces campagnes, organisées par le Comité national de lutte contre le sida (Naca) et des ONG, ont touché l’ensemble du pays.

Désormais, selon M. Ekuno, toute publicité mettant en scène, représentant ou suggérant un acte sexuel par l’usage de mots, de graphiques de sons ou d’actions, devra être proscrite. Dans un communiqué, il a précisé souhaiter qu’une recommandation sanitaire soit mentionnée dans toutes les publicités de préservatifs.

La nouvelle règlementation prévoit également d’interdire leur diffusion au cours des programmes destinés aux enfants, ainsi qu’à la radio ou à la télévision avant 20 heures.

Enfin, les panneaux publicitaires promouvant l’utilisation du préservatif ne devront pas se trouver à proximité des lieux de culte, des écoles ou des hôpitaux, a mentionné Apcon.

Cette interdiction est hypocrite, selon les activistes

Pour les activistes de la lutte contre le VIH/SIDA au Nigeria, une telle réglementation est tout simplement contre-productive et peut compromettre les succès remportés par les campagnes de promotion du préservatif auprès d’un grand nombre de Nigérians.

Accuser ces campagnes d’être responsables d’une importante activité sexuelle chez les jeunes est «hypocrite», ont-ils estimé.

«Notre société est pleine de tromperies et de dénis», a déploré Ibrahim Umoru, un jeune homme séropositif, qui travaille comme pair-éducateur au sein du programme de l’organisation internationale Médecins sans frontières (MSF) à Lagos, le grand centre commercial du Nigeria.

«Qu’on le veuille ou non, les pratiques sexuelles explosent chez les jeunes, donc à moins de trouver un moyen de les forcer à pratiquer l’abstinence, vouloir limiter les campagnes de promotion du préservatif n’est pas la bonne solution», a-t-il expliqué.

Selon lui, les Nigérians étant très peu informés sur le VIH, «aucune action ne doit être prise qui vise à priver les personnes, toutes catégories d’âges confondues, d’informations dont elles ont besoin pour prendre une bonne décision concernant leur vie».

Le jeune homme a souligné que, compte tenu de la répartition géographique des écoles, des Eglises et des mosquées sur le territoire, interdire les panneaux publicitaires à proximité de telles institutions reviendrait à interdire complètement la promotion du préservatif.

«Les panneaux publicitaires ne s’adressent pas uniquement aux [jeunes], mais à l’ensemble de ceux qui habite ou travaille près de ces institutions !», a estimé Ibrahim Umoru.

Princess Olufemi Kayode, directrice exécutive de l’ONG nigériane Media Concern for Women and Children, s’est également insurgée contre la décision d’APCON : tout en estimant qu’il ne fallait pas promouvoir les partenaires sexuels multiples, elle a reconnu que le taux d’activité sexuel des jeunes était alarmant.

«Nous sommes très surpris de voir que même lorsqu’ils sont encore très jeunes, les jeunes ont des rapports sexuels ou ils sont abusés sexuellement par leurs aînés qui profitent de leur ignorance», a-t-elle expliqué.

M. Kayode a précisé qu’en l’absence de séances d’information sur les questions liées à la sexualité dans les écoles et les institutions religieuses, il était nécessaire d’offrir tous les moyens de protection à ceux qui ne peuvent s’abstenir d’avoir des rapports sexuels.

Bisi Aborishade, rédacteur en chef du site internet d’informations sur le sida NigeriaHIVinfo.com, s’est montré lui aussi très critique. Selon lui, le taux d’infection au Nigeria, estimé à cinq pour cent de la population, justifie la promotion du préservatif.

«Les jeunes sont sexuellement actifs plus tôt qu’autrefois, les jeunes filles sont plus nombreuses à avorter et davantage de jeunes hommes deviennent pères. Les femmes mariées, quant à elles, sont contaminées au VIH dans le lit conjugal», a-t-il dit.

«Que l’on m’explique alors pourquoi les étudiants ne doivent pas être visés par les campagnes de promotion du préservatif!», s’est-il exclamé.

«Partout, que ce soit à la radio, à la télévision, dans les chansons, il est question de sexe. A quoi peut bien servir la réglementation des campagnes publicitaires ?», s’est interrogé M. Aborishade.

Tout en reconnaissant que la réglementation d’Apcon risquait d’avoir un impact négatif sur la promotion et la vente des préservatifs, Sam Archibong, responsable de la communication au Naca, a indiqué que le comité préférait se soumettre plutôt que d’être considéré comme étant une organisation promouvant les relations sexuelles avec des partenaires multiples.

«Nous ne pouvons pas prendre part à un tel débat car nous faisons également la promotion de l’abstinence et de la fidélité mutuelle. C’est un sujet sensible et nous voulons respecter le point de vue de chacun», a-t-il expliqué.

Selon le Naca, il s’agit de faire preuve de créativité, afin de mettre au point des campagnes publicitaires qui ne feraient aucune allusion directe au sexe et respecteraient ainsi toutes les sensibilités.


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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