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A la recherche de données fiables sur le sida

Combien y a-t-il de personnes infectées au VIH sous antirétroviraux (ARV) en Guinée ? Combien d’entre elles sont co-infectées à la tuberculose ? Où en est-on des stocks d’ARV ? Quels sont les groupes vulnérables, et où sont-ils ? Ces questions, cruciales pour organiser la lutte contre le sida, ont pourtant toutes les peines à trouver des réponses en Guinée.

« On remarque des faiblesses notoires des mécanismes de suivi-évaluation des IST [infections sexuellement transmissibles] et VIH et, plus généralement des lacunes dans le système d’information sanitaire en Guinée. La crédibilité et la fiabilité des données et des informations rassemblées à ce jour restent assez limitées », a noté Marcos Sahlu, coordinateur du Programme commun des Nations Unies sur le sida, ONUSIDA, en Guinée.

Pourtant, a rappelé Franck Bossant, chef de mission de la section belge de l’organisation Médecins sans Frontières en Guinée, qui fournit des antirétroviraux à quelque 3 000 personnes dans le pays, « ces chiffres sont essentiels pour le calcul des besoins ».

Selon les estimations officielles, il y aurait actuellement quelque 8 000 personnes sous ARV dans le pays, mais en l’absence d’un système permettant de centraliser et de recouper les données provenant des différents centres de traitement, il n’est pas exclus que certains patients aient été recensés plusieurs fois, a reconnu le docteur Mouctar Diallo, coordonnateur du Programme national de prise en charge sanitaire et de prévention des IST [infections sexuellement transmissibles]/VIH/SIDA, le PNPCSP.

« Avec le problème de ruptures d’ARV que la Guinée a connu [en 2008], il est possible que certaines personnes soient venues se réinscrire dans d’autres centres sans le dire », a dit M. Bossant.

Le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, l’un des deux principaux bailleurs de fonds de la lutte contre le sida en Guinée, a suspendu son aide pendant plusieurs mois en 2008, dans l’attente d’explications sur l’utilisation de ses subventions : aucun nouveau patient n’a pu être mis sous traitement depuis quatre mois.

Or le manque de transparence dans la gestion des financements est en partie dû à un problème d’information sur les moyens et stocks existants. « Si encore [la rupture d’approvisionnement] était un problème de manque d’argent, mais ce n’est pas le cas, l’argent est là », a noté un acteur de la lutte contre le sida en Guinée. « Faire en sorte que les médicaments arrivent à temps n’est quand même pas insurmontable ».

Pratiques et groupes à risque

Des données sur le VIH existent, mais elles datent pour la plupart de 2005, date de la dernière enquête démographique et de santé (EDS), et ont en outre été recueillies auprès d’un échantillon restreint, a noté M. Diallo, du PNPCSP.

Elles sont en outre incomplètes, a noté le docteur Hadja Mariama Djélo Barry, secrétaire exécutive du Comité national de lutte contre le sida (CNLS) : par exemple, la transmission du VIH via des pratiques traditionnelles n’a pas été évaluée dans le précédent cadre stratégique nationale, couvrant les années 2003-2007, or l’excision est toujours largement pratiquée, sans aucun contrôle sanitaire.

De même, aucune donnée n’est disponible concernant certains groupes généralement considérés comme vulnérables à l’infection, comme les MSM (hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes), a reconnu Mme Djélo Barry. Il n’y a pas plus d’éléments permettant de savoir combien de personnes séropositives sont co-infectées à la tuberculose, la principale infection opportuniste liée au VIH.

Pour l’instant, les données disponibles sont surtout les indicateurs requis par les bailleurs de fonds dans le cadre du suivi et de l’évaluation des projets qu’ils financent, a noté Nathalie Daries, chef de mission de l’organisation Solidarité thérapeutique et initiatives contre le sida (SOLTHIS), qui a démarré ses activités en 2008 en Guinée et dont l’un des objectifs est justement d’aider le pays à acquérir les compétences et les outils nécessaires à la collecte de données.

Confrontés à ce manque de données, les acteurs de la lutte contre le sida en Guinée, lorsqu’ils veulent avoir des informations sur la situation réelle de l’épidémie pour pouvoir orienter efficacement leurs interventions, n’ont souvent d’autre choix que d’aller eux-mêmes sur le terrain pour essayer de les collecter –des opérations longues et coûteuses, et qui ne résolvent pas le problème du partage de l’information.

La réponse

Pour aider le pays à se doter d’un système d’information sanitaire efficace, les partenaires ont lancé différentes initiatives.

SOLTHIS a soutenu la mise en place d’un logiciel à l’hôpital Donka, l’un des deux principaux centres hospitalier de Conakry, la capitale, pour recueillir des données sur les personnes sous traitement. D’autres centres de traitement du pays devraient ensuite être également équipés de ce logiciel.

Parallèlement, l’ONG a commencé à former des personnels à l’utilisation de ces outils, le manque de personnels qualifiés, tant sur le plan médical qu’administratif, étant un autre obstacle majeur à la collecte des données. 

Par ailleurs, l’ONUSIDA, en collaboration avec d’autres partenaires, s’apprête à lancer un exercice de cartographie des risques et de la vulnérabilité, des offres de service et des interventions dans le cadre de la riposte à l’épidémie du sida en Guinée. Cette opération devrait permettre d’identifier et de localiser les groupes à risque pour pouvoir répondre à leurs besoins ; il s'agit également d’améliorer l’efficacité et la qualité des interventions et l’élargissement de la riposte nationale, a expliqué M. Sahlu.

Utiliser les données

Une fois que des données seront recueillies, il restera à les utiliser : celles qui sont actuellement disponibles et permettent au moins d’indiquer des tendances ne sont pas toujours utilisées comme elles le devraient, a noté Mme Djélo Barry.

Par exemple, l’enquête EDS 2005 a révélé que le VIH/SIDA en Guinée, particulièrement chez les femmes, était « une maladie d’intellectuels », a-t-elle noté : les femmes instruites sont près de quatre fois plus touchées que celles qui n’ont pas reçu d’instruction, et les femmes issues de milieux aisés près de trois fois plus que les femmes pauvres.

Malgré ces indications, « la stigmatisation liée au VIH/SIDA étant encore très forte, ces groupes ne se font pas connaître et sont donc difficiles à cibler », a-t-elle noté.

ail/

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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