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Des injections plus sûres

Le téléphone sonne dans le bureau de la chef de l’unité centrale des soins infirmiers du ministère de la santé (MISAU, en portugais), Olga Novela. A l’autre bout du fil, l’infirmière Alice Macauzane, de l’hôpital José Macamo, à Maputo, la capitale mozambicaine, demande de l’aide : l’une de ses collègues vient de se piquer accidentellement avec une seringue qui contenait le sang d’un des patients.

« Que devons-nous faire ? », demandait Mme Macauzane.

Dans un pays où le taux de prévalence du VIH est estimé à 16,2 pour cent de la population adulte, la principale crainte des soignants dans ce cas est l’infection par le virus, d’autant plus que selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), dans les pays à forte prévalence, les patients séropositifs occupent plus de la moitié des lits d’hôpitaux.

De ce fait, lorsqu’un accident de ce type arrive, il y a une grande probabilité que le sang soit contaminé par le HIV.

Cependant, le risque d’infection par le contact accidentel avec le sang est faible, puisque le virus est peu résistant à l’air. La probabilité d’une éventuelle contamination est de seulement trois pour mille.

Malgré cela, le docteur Carlos Rojas Machado, chirurgien à l’hôpital central de Maputo (HCM), a dit à IRIN/PlusNews qu’il craignait cette éventualité. « Et si je faisais partie d’un de ces trois cas ? », s’est-il inquiété.

De nationalité cubaine, M. Machado travaille depuis 12 ans au Mozambique ; il a raconté qu’il s’était déjà piqué plusieurs fois avec des aiguilles qu’il avait utilisées pour des patients séropositifs.

« Il m’est déjà arrivé que du sang me gicle dans les yeux », a-t-il dit. « Lorsque cela arrive, toute ma vie défile dans ma tête en quelques secondes. Je pense à mon épouse, à mes enfants… ».

Des données de l’hôpital de jour du HCM révèlent que dans la période de juin 2003 à mars 2004, 46 membres du personnel on été pris en charge, victimes d’accidents avec du sang.

Vingt-six d’entre eux ont signé le livre de registre de l’hôpital. Quinze travaillaient dans le service de chirurgie. L’accident le plus fréquent était la piqûre avec une aiguille d’injection, et seulement cinq d’entre eux portaient des gants.


Photo: MMIS
Des déchets hospitaliers
Les médecins ne sont pas les seuls qui risquent l’infection au VIH : les patients aussi. Plus de 16 milliards d’injections médicales sont utilisées chaque année dans les pays en développement, et de 20 à 50 pour cent d’entre elles ne sont pas sûres, selon l’OMS.

Au Mozambique, la première tentative de résoudre ce problème a eu lieu en 2002, lorsqu’a été créé le Programme élargi de vaccination (PEV) avec l’appui de l’alliance GAVI –connue auparavant sous le nom d’Alliance globale pour les vaccins et l’immunisation.

L’objectif du programme était d’intensifier l’utilisation dans les hôpitaux publics de seringues autobloquantes, c’est-à-dire qui ne peuvent pas être utilisées, puisqu’elles se bloquent automatiquement une fois qu’elles ont servi.

Cependant, une étude menée par le PEV en 2004 a démontré que 40 pour cent des centres de santé n’utilisaient pas des seringues jetables car, pour des raisons de planification et de logistique, ils n’avaient pas assez de matériel en stock.

Cette même année, le gouvernement a conclu un partenariat avec l’organisation non gouvernementale internationale John Snow Incorporated à travers un financement par le Plan d’urgence du président américain George Bush contre le Sida (PEPFAR).

Rendre plus sûres les injections médicales (MMIS, en anglais) est le nom du projet issu de ce partenariat, encore en place aujourd’hui.

Des injections plus sûres

Mario Marrengula, du MMIS, a dit à IRIN/PlusNews que plus de cinq millions de seringues autobloquantes et 65 000 réceptacles de sécurité pour la collecte des seringues usagées ont déjà été distribués dans les hôpitaux à travers le pays.

Il a souligné encore que les déchets hospitaliers tels que seringues et échantillons de sang qui étaient jetés dans des poubelles ordinaires provoquaient un risque d’infection, surtout par le virus de l’hépatite, pour les responsables du ramassage.

C’est pour cette raison que 64 zones de traitement de ce type de matériel ont déjà été créées dans les provinces de Sofala, Manica, Gaza et Maputo.

Dans les provinces de Sofala, Manica, Tete et Maputo, 227 travailleurs sanitaires ont été formés comme facilitateurs en injections sécurisées.


Photo: MMIS
Un réceptacle dans un hôpital pour stocker les seringues et autres produits
« L’on dit toujours que la propagation du VIH par des relations sexuelles n’est pas contrôlée, mais je crois que la contamination par les seringues ne l’est pas non plus », a dit M. Marrengula.

On s’inquiète pour les travailleurs réguliers de la santé, mais aussi pour les « irréguliers », comme les infirmiers, techniciens en médecine, entre autres, qui ont pris la retraite ou ont quitté leur poste pour une quelconque raison, mais qui continuent à travailler et à utiliser des injections de manière informelle.

Nettoyer la blessure et faire le test rapide de dépistage du HIV du professionnel de santé ainsi que du patient sont les premiers réflexes à avoir en cas de contact avec du sang.

L’étape suivante est la Prophylaxie post-exposition (PEP) : la personne exposée prend un régime double ou triple de médicaments antirétroviraux dans les 72 heures qui suivent l’exposition, mais de préférence dans les quatre premières heures.

Il est important de le faire rapidement, car plus le temps passe, plus grand est le risque que le VIH complète son cycle d’infection, après quoi il est impossible de l’éliminer.

Si elle est administrée correctement et dans les délais, la PEP est efficace dans 80 pour cent des cas.

Malgré le fait que la PEP soit disponible dans certains centres du Mozambique depuis plusieurs années déjà, un grand nombre de professionnels de la santé ignorent son existence, a regretté Mme Novela.

« Il suffit de demander aux professionnels de la santé quelle serait leur réaction s’ils avaient un accident avec une injection. Plusieurs d’entre eux ne sauraient pas répondre », a-t-elle affirmé.

En réponse à cette situation, le MISAU a lancé en janvier une campagne d’information sur la PEP à l’attention des professionnels de la santé.

Des équipes spécialisées sont en train de sensibiliser sur cette méthode de protection dans les hôpitaux.

Selon Mme Novela, seuls les provinces de Ihnambane et Maputo n’ont pas encore reçu leur visite, mais cela devrait se faire d’ici à la fin du mois de juin. Ensuite l’on visera les travailleurs informels de la santé.

Avec cette mesure, l’unité centrale des soins infirmiers du MISAU espère ne plus recevoir des appels téléphoniques tels que celui de Mme Macauzane.

« J’espère en revanche recevoir des appels qui annoncent qu’il n’y a plus d’accidents ; si toutefois cela devait arriver, j’espère que la PEP sera faite correctement pour éviter le risque d’infection », a conclu Mme Novela.


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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