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Une mystérieuse épidémie de maladies rénales au Sri Lanka

A kidney disease of unknown causes continues to kill hundreds annually in Sri Lanka, mostly all from one province in the north central Dilrukshi Handunnetti/IRIN
Farmers, mostly over 40, continue dying from a kidney disease of unknown origins
L’augmentation du nombre de cas de maladie rénale chronique d’origine inconnue (CKDU) est rapidement en passe de devenir une nouvelle crise sanitaire au Sri Lanka. En effet, 80 pour cent des décès des patients des hôpitaux de la province la plus touchée du pays seraient liés à une insuffisance rénale. La maladie - certains parlent de « fléau inconnu » - a provoqué des migrations intérieures, notamment chez les jeunes vivant dans les régions les plus exposées au phénomène.

Les chercheurs n’ont pas réussi à en identifier la cause, ce qui limite les efforts pour enrayer la maladie qui cause une insuffisance rénale et, dans le pire des cas, la mort.

D’après les dossiers d’hospitalisation, les hommes de plus de 40 ans seraient les plus exposés, ce qui pousse de nombreuses familles de la région du centre-nord de l’île (la plus touchée du pays) à encourager les jeunes hommes à migrer.

Âgé de 48 ans, Manamendra Padmasena* est agriculteur dans la capitale de la province du Centre-Nord (NCP), Anuradhapura, et suit un traitement contre le CKDU depuis six ans. Il prend 48 comprimés par jour, en trois prises, et doit être constamment hospitalisé, tout au long de l’année. Sa femme est également atteinte par la maladie.

« Nous ne pouvons pas trouver de travail, car nous en sommes incapables. Nos deux fils travaillent la terre, mais sont aussi employés comme manoeuvres pour nourrir la famille », a déclaré à IRIN M. Padmasena. Sumana, sa femme, est inquiète pour l’avenir de ses fils et déclare en pleurant que leurs chances de se marier sont réduites à « néant » à cause de la maladie de leurs parents.

« Nous sommes un fardeau pour nos enfants. Les villageois ne veulent pas marier leurs filles à des enfants comme les nôtres, car ils ont peur de se retrouver eux aussi atteints d’une insuffisance rénale. »

Les trois enfants de leur voisin Agalawatte Padmasiri* ont quitté la région – un phénomène de plus en plus commun, car les gens fuient la maladie, selon les villageois – lorsque des membres de leur famille ont été atteints par la maladie. « S’ils étaient restés, ils n’auraient pas pu trouver de travail, ni se marier », a déclaré à IRIN M. Padmasiri.

Le directeur de l’unité de prévention des maladies rénales de l’hôpital général d’Anuradhapura (NCP, la province la plus touchée de l’île), Dr Asanga Ranasinghe, a confirmé cette tendance. Il a affirmé que les familles des patients avaient des difficultés à marier leurs proches, car les partenaires potentiels craignaient d’être ainsi exposés à une insuffisance rénale.

« Les gens sont victimes d’une psychose et d’un manque de connaissance. Ils croient que le CKDU est transmissible, voire génétique. Si les membres d’une famille sont atteints par le CKDU, les autres membres auront plus de mal à se marier ».

« Cette stigmatisation de la maladie fait fuir les jeunes », a déclaré Hemantha Vithanage, directeur exécutif de l’organisation non gouvernementale (ONG) locale « Centre for Environmental Justice » (Centre pour la justice environnementale) qui a participé aux recherches sur la maladie.

Vingt mille patients originaires d’une même province

D’après les estimations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), près de 20 000 patients reçoivent des soins contre le CKDU dans la province NCP. La majorité des patients sont originaires d’Anuradhapura, le district le plus densément peuplé, où la maladie a été signalée pour la première fois en 2000.

Selon Dr Ranasinghe, la moyenne du taux de mortalité lié à l’insuffisance rénale de la province était de 19 par mois fin 2013, soit le plus fort taux de l’île.

En 2013, quelque 2 000 cas ont été signalés dans le pays, principalement dans les districts de Medawachchiya et d’Anuradhapura (près de 1 600 décès liés au CKDU ont été signalés de 2002 à 2010), principalement dans la province NCP. Selon Dr Ranasinghe, l’augmentation annuelle des patients malades du rein à Anuradhapura est d’environ 1 450, dont 450 dans le district provincial de Polonnaruwa.

Les responsables sanitaires ont interdit l’importation de trois pesticides (chlorpyriphos, propanil et vabarly) en avril 2013, quand les chercheurs locaux ont établi un lien entre les produits agrochimiques et la maladie. Le ministre de l’Agriculture, Mahinda Yapa Abeywardena, a déclaré à IRIN : « Ces pesticides sont extrêmement nocifs pour la santé. Même s’il n’y a pas de lien direct, il s’agit d’une action préventive ».

Le ministère de la Santé dépense près de 3 millions de dollars par an pour soigner les personnes atteintes par le CKDU. Pour les personnes malades du rein sous traitement régulier, l’État prévoit une pension mensuelle d’environ 4 dollars par personne et de 11 dollars pour les patients sous dialyse.

Des problèmes de données

Bien que les hôpitaux consignent le nombre de malades du CKDU, les données sont encore fragmentaires, a déclaré Dr Ranasinghe. « Sur 10 décès hospitaliers dans la province NCP, huit sont liés à une insuffisance rénale. » Il a ajouté que de nombreux malades n’étaient pas diagnostiqués dans les villages.

Deux rapports de recherche publiés en 2012 sur les causes du CKDU sont en désaccord sur les statistiques et sur les causes probables. Selon un rapport de l’OMS, le CKDU toucherait 15 pour cent de la population des provinces d’Uva et du Centre-Nord (soit près de 60 000 personnes) et aurait causé la mort de 22 000 personnes depuis 20 ans, à Anuradhapura seulement. Selon les résultats de l’OMS, la maladie se propagerait dans les provinces d’Uva, de l’Est et du Sud.

Or, une étude parallèle du Centre pour la science et l’environnement (CSE), implanté à New Delhi, porte à plus de 15 000 le nombre de personnes atteintes dans la province NCP et évoque la contamination de l’eau comme vecteur potentiel.

Cela ne fait que souligner le besoin de recherches scientifiques fiables, a déclaré à IRIN Oliver Ileperuma, chef du département de chimie à l’Université de Peradeniya, NPC, au Sri Lanka. « Les causes sont multiples et identifiées par différentes recherches. Il est important de traiter cela comme une crise sanitaire qui s’aggrave et de multiplier les programmes de prévention. »

*Les noms ont été modifiés pour protéger la vie privée

dh/pt/cb-fc/amz


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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