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Les conditions dans les centres de détention alimentent la violence en Indonésie

Two asylum-seeking boys stand on a staircase while detained at Belawan Immigration Detention Center in September 2012
Kyle Knight/Human Rights Watch
Many of the IDCs are overcrowded
Les conditions désastreuses dans les centres de détention pour immigrés favorisent les explosions de violence, affirment des militants des droits de l’homme. Plusieurs de ces sites se trouvent dans des régions éloignées du pays, parfois jusqu’à 2 000 km de la capitale, Jakarta.

« Les conditions dans les CDI [centres de détention pour immigrés] surpeuplés et sordides contribuent à créer une atmosphère tendue qui peut mener à la violence », a dit à IRIN Alice Farmer, chercheuse à Human Rights Watch (HRW) et auteur d’un rapport de 2013 sur les mauvais traitements subis par les enfants migrants en Indonésie. 

Le gouvernement indonésien fait fonctionner jusqu’à 16 centres où sont détenus les immigrés qui entrent illégalement sur le territoire – principalement pour rejoindre l’Australie - notamment des demandeurs d’asile qui fuient la persécution et les conflits dans leur pays d’origine.

Selon les données recueillies par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) en novembre 2013, l’Indonésie accueille 10 897 réfugiés et demandeurs d’asile, dont la majorité est originaire d’Irak, d’Afghanistan, du Pakistan, du Sri Lanka ou du Myanmar.

Le 6 avril 2013, des Rohingyas–  une minorité musulmane du Myanmar – auraient attaqué des bouddhistes birmans à l’intérieur du centre de détention pour immigrés de Belawan, situé sur l’île de Sumatra, en raison du harcèlement sexuel qu’aurait subi un musulman. Ces violences qui s’en sont suivies ont fait huit victimes.

La surpopulation, associée aux longues périodes de détention, compromet les droits des immigrés et les expose à un risque accru de violence, selon les militants. Une meilleure coopération et un meilleur suivi constituent un premier pas vers une solution.

Surpopulation : quatre fois plus de détenus

Commentant les violences du mois d’avril, Denny Indrayana, ministre adjoint de la Justice et des Droits de l’homme, a indiqué que le centre de Belawan accueillait 480 migrants à l’époque, soit quatre fois plus de détenus que sa capacité d’accueil, selon un entretien réalisé par HRW auprès du directeur du centre. 

Anil*, un migrant sri-lankais de 35 ans détenu au centre de Belawan depuis 11 mois, a été témoin de l’affrontement. Il a indiqué que l’atmosphère à l’intérieur du centre n’était plus la même depuis les violences. « Nous avions peur qu’il y ait d’autres affrontements. Nous avons commencé à manifester pour notre libération ». Un responsable de l’immigration (il a demandé à garder l’anonymat) a indiqué que le centre de détention pour immigrés de Belawan comptait 265 migrants à la mi-décembre 2013.

Belawan n’est pas un cas unique.

Selon le rapport de 2013 de HRW, plusieurs centres ont connu des périodes régulières de surpopulation, avec « des pièces pleines à craquer offrant peu ou pas d’intimité » et une toilette pour 37 personnes dans l’un des établissements. Le rapport a également indiqué que des détenus, y compris des enfants, auraient subi des actes de violence.

« Au centre de détention pour immigrés de Pontianak [sur l’île indonésienne de Kalimantan], j’ai discuté avec des dizaines de migrants et de demandeurs d’asile qui ont dit craindre les violences à l’intérieur du centre », a dit Mme Farmer du HRW. « Les antécédents de violence des gardes envers les détenus perpétuent ce problème … aucun enfant, aucun demandeur d’asile ne devrait être laissé dans ces conditions ».

L’attente dure, l’espoir s’amenuise

Anil, l’immigré sri-lankais, a parlé des conditions de vie changeantes, y compris la quantité et la qualité de la nourriture, et des installations sanitaires de base peu fiables depuis sa mise en détention en janvier 2013. « Depuis vingt jours, nous avons du mal à avoir de l’eau, en raison d’un problème de canalisation ».

Selon le HCR, 142 réfugiés ont fait l’objet d’une réinstallation dans un pays tiers - souvent en Australie - au mois de novembre, amenant le total à 875 personnes pour l’année 2013, soit le nombre le plus élevé de la décennie passée.

Mais pour bon nombre de migrants, la période d’attente peut être terriblement longue. Certains demandeurs d’asile passent des années dans des centres de détention ou d’autres établissements où l’accès est restreint sans pouvoir travailler, ni envoyer leurs enfants à l’école, en attendant d’obtenir des informations concernant leur demande.

Cette frustration conduit bon nombre de ces migrants à se tourner vers des passeurs qui tentent de les faire entrer en Australie à bord d’embarcations peur sûres et surchargées. 

Chaque année, des centaines de demandeurs d’asile, dont un grand nombre de femmes et d’enfants, perdent la vie lors de ce dangereux périple. Le 10 décembre, un bateau a sombré aux larges des côtes indonésiennes et trois demandeurs d’asile, dont un enfant, sont morts. 

La coopération est centrale

L’Indonésie n’est pas signataire de la 1951 Convention de 1951 relative aux réfugiés ni de son Protocole de 1967, mais les observateurs indiquent que cela ne devrait pas les empêcher d’améliorer les conditions de vie dans les centres de détention pour les immigrés. Ils ont appelé l’Australie à prendre l’initiative. 

« En fin de compte, l’Indonésie devrait devenir partie à la Convention relative aux réfugiés, mais cet objectif ne sera pas atteint tout de suite, alors il faut prendre des mesures temporaires pour améliorer les conditions de vie des migrants dans le pays », a dit Graeme McGregor, coordinateur de la campagne réfugiés d’Amnesty International-Australie.

HRW a recommandé que le versement des fonds australiens alloués aux opérations relatives aux migrants en Indonésie soit « subordonné au respect des droits de l’homme et des normes internationales en matière de détention des migrants, y compris des dispositions en matière de suivi et d’analyse ». 

M. McGregor a souligné, « Un grand nombre d’activités de détention liées à l’immigration en Indonésie sont financées par l’Australie, et si l’Australie est l’un des seuls pays de la région dotés de mécanismes, quoique défectueux, pour le traitement des demandeurs d’asile et des réfugiés, il y a encore beaucoup d’hypocrisie dans ses politiques et ses actions ».

Évoquant une série de recommandations faites par Amnesty concernant le rôle de l’Australie en matière de demande d’asile dans la région Asie-Pacifique, il a dit, « Travailler à l’amélioration des conditions et des pratiques de détention en Indonésie contribuerait à réparer cette hypocrisie ». 

*Nom d’emprunt

kk/ds/he-mg/amz

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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