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L'éducation : un long et difficile parcours pour les jeunes filles

[Senegal] Kewe Thiam is the only girl in her village to have completed high school. [Date picture taken: 09/01/2006] Emilie Riley/IRIN
Kewe Thiam is the only girl in her village to have completed high school.
Kewe Thiam est l’exception à la règle qui veut que la plupart des jeunes filles sénégalaises arrêtent leurs études avant le cycle secondaire.

Assise au milieu d’un groupe de gens de son âge, Kewe est la seule jeune fille – avec une douzaine de garçons – à aller à l’école.

« Les filles d’ici aimeraient bien aller à l’école, mais leurs parents n’ont pas les moyens. Ils ne peuvent pas se permettre de payer pour les frais d’inscription ou le matériel scolaire », explique Kewe, 20 ans, qui parlent au nom des autres jeunes filles du groupe parce qu’elles n’ont pas eu la chance d’apprendre le français, langue d’instruction au Sénégal.

Dans son village, Kewe est la seule fille à avoir le baccalauréat. Et elle est en dernière année d’un programme de formation en comptabilité dispensé dans un établissement de Kaolack, la grande ville, située à 1h30 de route de son village.

Comme dans beaucoup de villages d’Afrique de l’Ouest, l'éducation reste un rêve éloigné pour beaucoup de jeunes filles. Selon le Fonds des Nations unies pour l'enfance (UNICEF), quarante pour cent des filles sénégalaises de sept à douze ans n’ont pas accès à une éducation de base, et celles qui sont inscrites dans des écoles sont susceptibles d’abandonner leurs études. Soixante pour cent des filles sénégalaises sont analphabètes. D’après le ministère de l'Education du Sénégal, 80,6 pour cent des filles ont démarré l’année scolaire 2004-2005, mais seulement huit pour cent ont eu le baccalauréat.

Les jeunes filles abandonnent prématurément l’école

Pendant ces années importantes, plusieurs facteurs peuvent expliquer l’arrêt de la scolarité de ces jeunes filles et leur intrusion dans le monde adulte où elles sont souvent mal préparées pour faire face à leur nouvelle vie.

« Beaucoup de parents ne réalisent pas l’importance de l’éducation et retirent leurs filles de l’école à un moment ou l’autre », explique Anta Basse Konté, présidente de la Commission scientifique du Forum des femmes éducatrices (FAWE) au Sénégal.

FAWE est une organisation panafricaine dont l’objectif est d’améliorer l’accès des jeunes filles à l’éducation et le taux de maintien scolaire et d’assiduité de ces dernières.

L’organisation mène des campagnes de sensibilisation en insistant auprès des parents sur la nécessité de maintenir leurs filles dans le système scolaire. FAWE procure également une assistance financière et des bourses d’étude.

Selon Mme Konté, même dans une grande ville comme Dakar, la capitale du Sénégal, la scolarisation des jeunes filles n’est pas toujours bien perçue.

« D’après les résultats de l’enquête que nous avons menée dans certaines banlieues, le mariage précoce pose un sérieux problème, en particulier dans les communautés très traditionnelles où la forte influence de la religion encourage ce genre de pratique », affirme-t-elle.

Dans ces communautés, explique-t-elle, les marabouts, les chefs religieux et maître coraniques sénégalais, poussent les parents à trouver des maris pour leurs filles – parfois âgées d’à peine neuf ans. Mais généralement, les nouvelles responsabilités de la jeune épouse au sein de son foyer ne lui permettent pas de poursuivre sa scolarisation.

« Les parents craignent que leurs filles tombent enceinte sans être mariées, car une telle situation serait une honte pour la famille », raconte Mme Konté pour expliquer les raisons pour lesquelles les parents acceptent les mariages précoces.

Et une école en particulier a vu ses classes se vider de ses jeunes filles parce qu’un marabout de la communauté pratiquait chaque année des mariages collectifs en mariant parfois entre 100 et 200 jeunes filles à la fois.

Les problèmes économiques sont également à l’origine des mariages précoces. En effet, certains parents considèrent parfois que leurs filles sont une charge financière et pensent qu’une dot peut financièrement aider la famille.

« Souvent, c’est simplement une question de pauvreté », explique-t-elle.

Pour cette raison, les filles peuvent aussi être retirées de l’école pour les faire travailler comme employée de maison ou vendeuse. Parfois, elles remplacent leur mère dans les travaux ménagers et s’occupent des plus petits quand les deux parents doivent travailler. Selon Mme Konté, ces situations sont fréquentes dans les villages de pêcheurs et d’agriculteurs.

Un cycle d’études primaires limité pour les filles

L’accessibilité à l’éducation est aussi un facteur important. Trente-cinq pour cent des écoles du Sénégal n’offrent pas un cycle d’études primaires complet, ce qui rend la situation plus complexe pour les jeunes filles qui souhaiteraient poursuivre des études secondaires. En outre, il arrive aussi que les parents ne disposent des moyens financiers nécessaires pour envoyer leurs filles dans des écoles éloignées ou ils craignent qu’elles échappent à leur contrôle si elles partent trop loin.

A Keur Omar Tounkara, une école primaire est ouverte depuis quatre ans. Les jeunes filles peuvent maintenant aller à l’école, mais leurs aînées n’ont pas eu cette chance. Elles sont restées au village et passent leur journée à faire la cuisine et le ménage, à s’occuper de leurs enfants et à aller chercher l’eau au puits.

Kewe confie qu’elle a dû faire beaucoup d’efforts et travailler ardemment pour atteindre ce niveau.

« Je me suis débrouillée. Ma famille s’est réunie et tout le monde a donné de l’argent pour que je puisse aller à l’école. Et j’ai étudié jour et nuit pour avoir de bonnes notes », explique-t-elle.

Après ses études de comptabilité, Kewe envisage de travailler dans une banque et de gagner un salaire décent pour aider sa famille.

« Trop souvent, les parents ne pensent qu’à court terme et ne voient pas l’école comme un investissement à long terme qui procurera à leurs filles des emplois mieux rémunérés, une plus grande autonomie et davantage de contrôle sur leur propre vie », explique Mme Konté.

Son organisation finance la formation universitaire d’une dizaine de jeunes étudiantes à l’étranger. Elle encourage également les filles à poursuivre des études en mathématiques et en sciences en offrant des bourses et parfois des ordinateurs portables.

Et Mme Konté insiste sur l’importance d’un changement dans l’approche de l’éducation des jeunes filles.

Si les filles avaient des modèles dont elles pouvaient s’inspirer, elles seraient bien plus motivées pour poursuivre leurs études, et si les parents connaissaient certains exemples de brillantes carrières réussies par des femmes, ils seraient peut-être davantage enclins à laisser leurs filles poursuivre leurs études, pense Mme Koné.

« Actuellement, les jeunes filles ont très peu de modèles intellectuels, a-t-elle déclaré. Il n’est donc pas anormal qu’elles arrêtent leurs études ».

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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