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Le préservatif de plus en plus utilisé... discrètement

[Mozambique] Condom demonstration in Care microfinance project Supinho locality. IRIN
The condom remains taboo
Sur l’île tanzanienne conservatrice de Zanzibar, on parle d’abstinence et de fidélité pour se protéger de l’infection au VIH, pas de préservatif. Pourtant, les statistiques sont formelles: son utilisation est en hausse... mais la lutte est loin d’être gagnée. La plupart des campagnes de prévention de l'infection au VIH se concentrent sur la méthode dite ABC (acronyme pour «Abstain, Be faithful, use Condoms»), prônant l'abstinence, la fidélité et l'utilisation du préservatif. Mais au large des côtes tanzaniennes, une partie de la population et les autorités religieuses de l’île de Zanzibar, à prédominance musulmane, considèrent l’utilisation du préservatif comme un tabou. Ce moyen de se protéger de l’infection au VIH fait donc rarement l’objet de messages de sensibilisation adressés au public. «Nous pensons que promouvoir l’utilisation du préservatif revient à encourager les rapports sexuels 'illégaux', notamment parmi les jeunes», a déclaré Fadhil Soraga, l'adjoint du mufti de Zanzibar, spécialiste de la religion musulmane. «La vraie campagne doit promouvoir l'abstinence et la fidélité». Ce refus d’évoquer l’utilisation du préservatif comme l’un des moyens de se protéger de l’infection au VIH est largement critiqué par de nombreux activistes de la lutte contre l’épidémie dans l’archipel. «Quand il s’agit de promouvoir l’abstinence et la fidélité, les messages fusent, mais quand il s’agit de promouvoir l’utilisation du préservatif, les messages sont plus discrets», a déploré Asha Hussein, l’un de ces activistes. En 2003, le gouvernement, avec le soutien des Nations unies, a mené une étude à Unguja et à Pemba, les deux principales îles de l’archipel de Zanzibar. Les résultats de cette étude ont révélé que ces deux îles affichaient un taux de prévalence de 0,6 pour cent - un taux relativement bas comparé aux sept pour cent enregistrés sur le continent. Mais ce chiffre ne doit pas cacher une réalité, selon les responsables de la santé: bien qu’encore faible, la prévalence du VIH/SIDA sur les îles est en train d'augmenter. Selon Ameir Khamis, coordinateur des programmes gouvernementaux de surveillance de l’épidémie et d’épidémiologie, 8 000 personnes vivent actuellement avec le VIH à Zanzibar. Ils étaient 6 000 en 2002. Face au conservatisme d’une grande partie de la communauté, les responsables de Médecins du monde (MDM), une ONG internationale engagée dans la lutte contre le VIH/SIDA à Zanzibar, ont expliqué qu’ils devaient se montrer très prudents dans leurs campagnes de lutte contre la pandémie. «Nous utilisons divers moyens pour faire passer nos messages [de prévention du VIH] afin de freiner la propagation du virus et d'autres infections sexuellement transmissibles. Mais parler du préservatif à Zanzibar reste extrêmement difficile», a reconnu Erene Casas, la coordinatrice du projet de MDM à Zanzibar. Grâce au soutien financier de l’Union européenne, MDM tente depuis avril 2002 de combattre la propagation de l’épidémie, la transmission du virus de la mère à l'enfant et les infections sexuellement transmissibles dans l’archipel. L’ONG organise également des activités de sensibilisation de la population, notamment des jeunes, sur la question des relations sexuelles sans risque. Le préservatif, plutôt que le changement de comportement? «Les chefs des communautés – qu’ils soient religieux ou civils- ne sont pas prêts à promouvoir l'utilisation du préservatif», a affirmé Ameir Khamis. «Notre culture est le meilleur remède contre le VIH/SIDA. Respectez notre culture et notre religion pour stopper la propagation de la maladie», peut-on lire sur une affiche éditée par la Commission nationale de lutte contre le sida et placardée sur les murs de Stone Town, la principale ville de l’île. M. Soraga, l’adjoint du mufti, a attribué l’augmentation du taux de prévalence du VIH/SIDA à la perte des valeurs morales sur l’île. «Malgré les appels répétés des chefs religieux et les divers séminaires organisés sur le VIH/SIDA, le nombre de cas d’infection au VIH augmente à Zanzibar parce que les gens refusent de modifier leurs comportements sexuels», a-t-il souligné. «Les gens doivent changer de comportement, notamment en s’abstenant d’avoir des relations sexuelles illégales». Pourtant, bien que le gouvernement et les institutions religieuses répugnent à promouvoir le préservatif, de plus en plus de personnes, notamment les jeunes, en utilisent, mais en toute discrétion. Ramadhani Hassan, coordinateur de MDM au niveau local, a confirmé que la «consommation» de préservatifs était en hausse. «En juin puis en juillet derniers, pendant les festivals consacrés au cinéma et aux traditions, 90 000 préservatifs ont été distribués gratuitement», a-t-il souligné. «Les statistiques montrent que même s’il n’est pas autorisé de parler des préservatifs dans la société de Zanzibar, leur utilisation augmente». Des barrières très présentes Mais la stigmatisation et la discrimination continuent à constituer des obstacles à la prévention, au traitement et aux soins des personnes infectées par le virus à Zanzibar, a indiqué Mme Casas de MDM. De nombreuses personnes vivant avec le virus hésitent à dévoiler leur statut sérologique, même lorsque leurs employeurs les encouragent à aller se faire dépister au VIH. «Ces barrières [de la stigmatisation et la discrimination] sont tellement présentes que les personnes ne cherchent pas à se faire dépister au VIH ou à avoir accès aux traitements, ou même à se protéger de l’infection», a-t-elle affirmé. «Des connaissances incomplètes, la peur de la maladie et de la mort, les normes sexuelles et le refus de reconnaître la stigmatisation sont autant de causes qui peuvent justement entraîner la stigmatisation des personnes séropositives», a-t-elle ajouté. Selon l’association des personnes vivant avec le VIH/SIDA à Zanzibar, les personnes séropositives de l'île sont confrontées à l’isolement physique et social imposé par leur famille, leurs amis et leur communauté. Elles sont souvent victimes de discrimination jusque sur leur lieu de travail, ce qui entrave leur accès aux services publics. L’impossibilité pour les femmes de négocier l’utilisation du préservatif avec leurs partenaires constitue également un obstacle à la lutte contre le virus. Ramadhani Hassan a observé que la plupart des femmes, par manque de confiance en elles, ne parvenaient pas à demander à leurs partenaires d'utiliser un préservatif, ce qui les exposaient au risque d’infection au VIH. Une étude menée par le gouvernement en 2003 a révélé que le taux de prévalence du VIH était trois fois plus élevé chez les femmes que chez les hommes. Selon Mme Casas, la stigmatisation a pour conséquence de limiter la diffusion d’informations sur l'épidémie et sur les différentes possibilités de traitement. Elle décourage également les couples de parler des risques de contracter le virus Pourtant, a-t-elle conclu, «nous devons faire tout ce qui est possible pour mettre un frein à la propagation du VIH/SIDA ».

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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