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Un traité mondial plus contraignant pour lutter contre la dégradation des terres

The creeping Sahara desert also threatens life in Diffa, Niger Jaspreet Kindra/IRIN
La communauté internationale a engagé des discussions quant à la nécessité de rendre plus contraignant un traité mondial sur la dégradation des terres signé récemment.

Presque tous les pays du monde ont ratifié la Convention des Nations Unies pour la lutte contre la désertification (CNULD). Leurs représentants examinent maintenant la possibilité de rédiger un protocole ou un instrument juridique afin de permettre sa mise en œuvre.

Melchiade Bukuru, chef du bureau de liaison de la CNULD situé au siège des Nations Unies à New York, a dit à IRIN que les discussions au sujet de l’adoption d’un éventuel protocole avaient beaucoup progressé.

Le secrétariat de la CNULD a d’abord évoqué l’idée d’un protocole à l’occasion de la conférence Rio+20, qui a eu lieu en 2012. La proposition a ensuite été étudiée lors des rencontres scientifiques de la Convention. Ces progrès sont considérés comme significatifs, car les choses évoluent souvent lentement dans les forums multilatéraux.

Le protocole aurait pour objectif l’atteinte d’un taux zéro de dégradation des terres (Zero Net Land Degradation, ZNLD). La CNULD espère qu’il facilitera l’application de la Convention de la même façon que l’a fait le Protocole de Kyoto pour la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) pour la stabilisation des concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère.

Ian Hannam, président du groupe de spécialistes de l’utilisation durable des sols et de la désertification de la Commission du droit de l’environnement, qui dépend de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), la co-présidente Irene Heuser et l’ancien président Ben Boer militent en faveur de l’adoption d’un protocole depuis 2012.

« Ce nouvel instrument juridique pourrait prendre la forme d’une politique mondiale et d’un cadre de suivi », ont indiqué M. Hannam et ses collègues dans une déclaration. « Il a également été proposé que le protocole inclue les objectifs de chaque pays pour l’atteinte du taux zéro de dégradation des terres. Il pourrait s’agir, par exemple, d’un pourcentage des terres arables sous leur juridiction ou de régions situées dans les limites de leur juridiction. »

Le Protocole de Kyoto de la CCNUCC a obligé les pays à se fixer des objectifs assortis de délais pour la réduction des émissions à l’origine du réchauffement de la planète. Sa création se fondait cependant sur des données scientifiques, notamment la concentration des gaz à effet de serre et le taux de réchauffement de l’atmosphère. Si les données et les études à ce sujet continuent d’évoluer, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a cependant jeté les bases de la connaissance scientifique dans ce domaine.

La CNULD milite en faveur de la création d’un organe similaire : le Panel intergouvernemental sur les terres et les sols (Intergovernmental Panel on Land and Soil, IPLS). Celui-ci servirait d’autorité mondiale et fournirait des informations scientifiques crédibles et pertinentes pour aider les pays à prendre des décisions éclairées dans la lutte contre la dégradation des terres et la désertification.

Pour l’heure, les données scientifiques crédibles permettant de déterminer l’ampleur du problème sont rares, a indiqué une équipe de scientifiques dans un rapport commandé par la CNULD en 2012.

Selon les résultats des cinq évaluations mondiales menées au cours des quarante dernières années, la proportion des terres dégradées se situe quelque part entre 15 et 63 pour cent et celle des terres arides dégradées, entre 4 et 74 pour cent.

Les variations importantes sont dues aux différentes variables et méthodes utilisées pour les calculs.

« Nous devons attirer l’attention des décideurs, et notamment de ceux qui sont indirectement responsables de [l’application de] la Convention, comme les ministres des Finances [qui décident de l’allocation des fonds nationaux], et leur faire comprendre la pertinence de mettre en place une [stratégie de] gestion durable des terres… »
Malgré tout, d’après les meilleures interprétations des images satellites, plus de 20 pour cent des terres situées à la surface de la Terre – et dont dépend 1,5 milliard de personnes – ont perdu leur capacité à produire entre 1981 et 2003. Ces données ne fournissent cependant pas de détails pour chaque pays.

« C’est le GIEC qui a jeté les bases et permis l’intégration du changement climatique dans les discours politiques et les politiques », a dit M. Bukuru, soulignant l’importance des panels scientifiques.

« Il y a encore une certaine résistance [de la part de certains pays membres], mais la majorité des pays sont en faveur de sa création. »

En attendant, a-t-il ajouté, les pays peuvent utiliser les services de la Plate-forme scientifique et politique intergouvernementale sur la biodiversité et les services de l’écosystème (Intergovernmental Panel on Biodiversity and Ecosystems Services, IPBES) créée en 2012. L’IPBES évaluera l’état de la biodiversité de la planète, ses écosystèmes et les services essentiels qu’ils fournissent à la société.

M. Bukuru a dit que la CNULD était, pendant ce temps, entrée dans « le domaine du mesurable » en ce qui concerne son protocole.

En 2009, tous les États signataires de la CNULD se sont entendus sur un ensemble d’indicateurs, notamment l’étendue des terres placées sous la juridiction d’une nation et le nombre de personnes vivant au-dessus du seuil de la pauvreté dans les régions affectées par la dégradation des terres et la désertification. Depuis 2012, les pays ont commencé à rendre compte de ces indicateurs, conformément à leurs obligations.

Pour démontrer la pertinence des données, M. Bukuru a dit que la carte de la pauvreté coïncidait généralement avec celle des terres dégradées dans la plupart des pays en développement, sauf dans les pays producteurs de pétrole.

Les auteurs d’une étude publiée en 2009 et dirigée par Zafar Adeel, directeur de l’Institut pour l’eau, l’environnement et la santé de l’Université des Nations Unies (UNU-INWEH), ont également appelé à la création d’un groupe d’experts scientifiques. « La CNULD n’a pas pu bénéficier [de la connaissance scientifique], et nombre de ses hypothèses de base sont aujourd’hui mises en doute. On croyait par exemple que le Sahara avançait en permanence, mais les mesures satellites et les études réalisées récemment sur le terrain ont montré que les avancées et les reculs de ce désert étaient cycliques. »

Soutien financier

La CNULD a également entrepris de « mettre un prix sur l’action ou l’inaction en ce qui concerne la dégradation des terres, la désertification et la sécheresse, et il se trouve que l’action est moins coûteuse que l’inaction », a dit M. Bukuru.

Selon un rapport sur l’un de ces efforts présenté à l’occasion d’une récente rencontre scientifique de la Convention, la dégradation des terres coûte chaque année environ 490 milliards de dollars à la communauté internationale. Certaines études citées dans le rapport utilisaient cependant des méthodes différentes pour évaluer la dégradation et il n’y avait pas suffisamment de données disponibles pour certains aspects, selon Wagaki Mwangi, porte-parole de la CNULD.

« Nous devons attirer l’attention des décideurs, et notamment de ceux qui sont indirectement responsables de [l’application de] la Convention, comme les ministres des Finances [qui décident de l’allocation des fonds nationaux], et leur faire comprendre la pertinence de mettre en place une [stratégie de] gestion durable des terres… dans le contexte de développement du pays – la sécurité alimentaire, la sécurité énergétique, l’adaptation au changement climatique ou la réduction de la pauvreté. »

L’idée est de réaliser une analyse poussée des coûts et des avantages, comme le rapport Stern sur l’économie du changement climatique, présentée en 2006 par Sir Nicholas Stern, conseiller principal sur l’économie du changement climatique et du développement auprès du gouvernement britannique. Le rapport attribue une valeur monétaire à l’impact du changement climatique et à l’absence de réaction rapide de la communauté internationale, ce qui a permis d’attirer l’attention des chefs d’État et des ministres des Finances sur le sujet.

La CNULD appuie une initiative mondiale appelée Economics of Land Degradation (ELD), à laquelle participent la Commission européenne, le Centre de recherche pour le développement de Bonn (Allemagne), l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI), l’UNU-INWEH et le gouvernement allemand. L’objectif est d’établir une base scientifique solide pour développer des stratégies durables d’utilisation des terres et de réaliser une analyse coûts-avantages afin de contribuer à sensibiliser le public.

Si le financement des projets de lutte contre la dégradation des terres et l’impact des sécheresses s’est amélioré, il reste toutefois encore trop limité. Selon Mohamed Bakarr, du Fonds pour l’environnement mondial (FEM), le principal mécanisme de financement de la CNULD, seulement 320 millions de dollars sont disponibles pour le moment pour financer des projets dans les 144 pays éligibles. L’argent n’est pas distribué également entre les pays, mais en fonction de critères qui prennent en considération divers facteurs.

jk/he –gd/amz


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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