Heureusement son mari s’en est remis après avoir été soigné à l’hôpital de Gulu en Ouganda du nord. « Je ne peux pas lui pardonner ce qu’il m’a fait. Il est le seul homme que j’ai connu de toute ma vie, » a t-elle déclaré à IRIN/PlusNews. « J’ai [encore] envie de le tuer. »
Son mari Richard Okello*, a expliqué à IRIN/PlusNews n’avoir eu aucune idée qu’il était séropositif. « Je l’ai [seulement] appris quand ma femme m’a dit que je devais aller passer un test de dépistage VIH avec elle au service de consultation prénatale, » a t-il dit. « Le résultat m’a beaucoup choqué parce que j’ai toujours utilisé des préservatifs avec mes autres partenaires.
Je lui ai demandé pardon mais tout ce qu’elle dit, c’est que je l’ai trahie. Je ne savais pas que ça se terminerait comme ça, » a t-il ajouté.
Selon les travailleurs sanitaires du district de Gulu, le conseil prodigué aux personnes comme Mme Apiyo et M. Okello n’est pas suffisant pour gérer la complexité des sentiments et des questions auxquels il faut faire face après un diagnostic positif ».
« Le conseil dure moins d’un quart d’heure une fois que les patients ont reçu leurs résultats ; ils se retrouvent après coup tout seuls, sans aucun suivi, » a expliqué William Odur, psychiatre à l’hôpital de Gulu. « Quand ils apprennent qu’ils sont séropositifs, un certain nombre de patients développent des troubles mentaux, sont déprimés, se suicident ou tuent leur partenaire. »
Des conséquences mortelles
Le pays a connu plusieurs cas de meurtres à la suite d’un diagnostic de séropositivité ; parmi ceux-ci, le meurtre de sa femme par un homme du district de Rukungiri au sud-ouest, le lynchage d’une femme de Gulu soupçonnée d’avoir contaminé un homme et en septembre, la condamnation à mort d’une jeune femme de 20 ans du district de Soroti à l’est du pays, pour avoir tué son mari soldat, après avoir appris qu’elle était séropositive, mais pas lui.
« Je lui ai demandé pardon, mais tout ce qu’elle dit, c’est que je l’ai trahie ; je ne savais pas que cela se terminerait comme ça » |
Elle a remarqué que, pour gérer tout particulièrement les peurs, les soupçons, et l’anxiété quand l’un des partenaires est diagnostiqué séropositif, le conseil est nécessaire pour soutenir à la fois le partenaire négatif - qui a désormais de fortes chances de contracter le VIH - et le partenaire séropositif, qui a besoin de savoir comment mener une vie saine.
Selon les directives du ministère de la Santé sur le conseil et le dépistage VIH, seuls les conseillers qui ont reçu une formation, sont habilités à fournir information et conseil avant et après le dépistage VIH ; la formation dure au moins un mois et doit être menée par un organisme approuvé par le gouvernement.
Il faut plus de conseillers
Cependant, Zainab Akol, directrice des programmes de lutte contre le VIH au ministère de la Santé, a déclaré à IRIN/PlusNews que le gouvernement ne disposait pas d’un registre complet des conseillers opérant dans le pays. Elle a ajouté que beaucoup de conseillers formés professionnellement travaillaient dans d’autres domaines que le VIH.
Un conseiller à l’hôpital de Gulu a expliqué à IRIN/Plus News que les conseillers font souvent leur travail à la hâte, en raison du grand nombre de personnes qui viennent se faire tester volontairement après les campagnes publiques destinées à encourager le dépistage à grande échelle.
Paul Olobo a indiqué n’avoir reçu que 10 minutes de conseil à l’hôpital de Gulu.
« Vos résultats montrent que vous êtes séropositif, ce n’est pas tragique et il faut l’accepter. C’est ce qu’on m’a dit à l’hôpital et le travailleur sanitaire, tranquillement assis, attendait de passer au patient suivant, quand je suis sorti de la salle de consultation », a t-il dit. « C’est au patient de décider la prochaine étape ; ce n’est pas facile. »
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Privilégier la qualité sur la quantité
« Les conseillers doivent voir au-delà des objectifs et des chiffres et essayer de fournir un service de qualité à leurs clients, » a déclaré Mme Nakabugo de SCOT. « Les quelque 45 minutes accordées à chaque client sont souvent insuffisantes pour soulager leur anxiété. Le choc est une réaction naturelle ; il faut donc assurer un conseil avant et après le dépistage.
Les conseillers doivent aussi exploiter la richesse des communautés dans lesquelles ils travaillent, utiliser leurs réseaux de référence pour mettre les gens en contact avec des personnes qui peuvent les aider, » a t-elle ajouté. « Les conseils en matière de divulgation [du statut VIH], sont également importants. Si par exemple cela pose problème d’annoncer à votre famille que votre partenaire est séropositif mais pas vous, c’est peut-être mieux d’éviter de le faire. »
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*noms d’emprunt
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