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Le commerce du bétail, en plein essor dans les zones frontalières

Mandera Livestock market, in northeast Kenya Nur Ali Farah/IRIN Radio
Hundreds of animals change hands in the Mandera livestock market, northern Kenya
Le commerce du bétail est une activité florissante depuis plus de 20 ans entre la Somalie, l’Ethiopie et le Kenya, malgré l’insécurité endémique qui règne en Somalie et la sécheresse qui touche ses deux voisins ; un signe de résilience dans des circonstances extrêmes.

« Je suis dans ce [secteur] depuis plus de 20 ans ; j’ai connu des hauts et des bas », a confié à IRIN Abdi Mahmud Farah, président de l’Association du marché à bestiaux de Mandera.

L’association compte 24 membres originaires des trois pays, a-t-il indiqué.

« Le commerce fluctue en fonction des pluies, mais aussi de l’accessibilité aux marchés étrangers », a-t-il expliqué. « Avant, le Moyen-Orient était le plus gros marché et nous y envoyons encore du bétail, mais plus autant qu’avant ».

Le Kenya achète également beaucoup de bétail à des fins de consommation locale, a-t-il ajouté.

D’après M. Farah, des centaines d’animaux changent de mains au marché à bestiaux de Mandera, le deuxième plus grand après celui de Garissa, également dans le nord du Kenya.

« En moyenne, chaque jour, 300 à 400 chèvres et moutons, 120 à 150 bovins et environ 50 à 60 chameaux sont vendus », a expliqué M. Farah.

Un chameau se vend entre 50 000 et 60 000 shillings kenyans [625 à 750 dollars], a-t-il indiqué, une vache, entre 20 000 et 25 000 shillings [250 à 312 dollars] et une chèvre ou un mouton, entre 2 500 et 3 000 shillings (31 à 37 dollars).

Epargne

Gregory Akall, un pasteur de Turkana, originaire du nord-ouest du Kenya, qui se spécialise dans les questions relatives au pastoralisme et au changement climatique dans la Corne de l’Afrique et en Afrique de l’Est, a expliqué à IRIN le 5 octobre que l’élevage était essentiel pour les pasteurs, en tant que moyen de subsistance et pour leur sécurité alimentaire.

« Le commerce du bétail permet aux pasteurs de diversifier leurs revenus et de réduire le risque ou les pertes subies pendant les périodes de sécheresse : il leur permet en effet de constituer une épargne "bancable" sous forme d’argent, qui ne peut pas être décimée par la sécheresse, mais qui peut être utilisée pour se réapprovisionner une fois la sécheresse passée ».

Ce commerce permet d’injecter des fonds dans l’économie locale et donne aux pasteurs le pouvoir et l’influence nécessaires pour acheter des services de base, notamment en matière d’alimentation, d’éducation et de santé. « En outre, il réduit leur vulnérabilité en période de sécheresse et de catastrophe naturelle », a expliqué M. Akall.

Secteur de croissance

« Le commerce de bétail transfrontalier représente peut-être le principal secteur de croissance du commerce régional dans les régions frontalières d’Éthiopie, du Kenya et de Somalie », a expliqué Choice Okoro, responsable de plaidoyer et travailleur social au sein de la branche kenyane du Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA). « Mais cela ne peut être réalisé que si l’on soutient plus fermement [ce secteur]. Faciliter le commerce de bétail transfrontalier est une stratégie cruciale de réduction de la pauvreté pour la majorité des pasteurs, qui constituent le principal groupe de subsistance dans ces régions frontalières ».

Selon les estimations du Common Market of Eastern and Southern Africa, les bénéfices annuels réalisés dans le secteur du commerce du bétail s’élèveraient à plus de 60 millions de dollars, en incluant les activités commerciales menées le long de la frontière entre l’ouest de l’Ethiopie et l’est du Soudan, a expliqué Choice Okoro.

Résolution des conflits

« Nous avons tissé des liens très étroits entre commerçants des trois pays »
Abdiladif Haji, qui préside le comité des commerçants chargé de la sécurité et de la résolution des conflits, a expliqué à IRIN que malgré la guerre civile en Somalie, le commerce du bétail n’avait jamais cessé.

« Il n’y a pas eu un seul jour où le commerce a été interrompu en raison de problèmes du côté somalien », a-t-il déclaré, ajoutant : « les commerçants ont des difficultés et ont leur lot de problèmes, mais nous parvenons toujours à les résoudre. Nous sommes confrontés chaque jour à des problèmes : des vols d’animaux aux querelles d’ordre financier. Depuis 20 ans que je travaille dans ce secteur, nous n’avons jamais fait appel aux autorités. Nous les réglons ».

« Personne ne veut mettre en péril le commerce », a expliqué M. Haji. « C’est un commerce prospère et nous voulons qu’il le reste ».

« Nous avons des gens de l’autre côté de la frontière ; par exemple, si quelqu’un prenait du bétail au Kenya et passait la frontière somalienne, nos membres en Somalie s’assureraient que le problème soit résolu », a indiqué M. Haji. « Il en va de même du côté éthiopien et du côté kenyan ».

« Nous avons tissé des liens très étroits entre commerçants des trois pays. Les membres appartiennent tous à des clans et des sous-clans, mais nous avons un dénominateur commun : le commerce, et nous ne voulons pas qu’il soit détruit ».

Avantages sociaux

Dans un document d’information récent, rédigé pour le compte de la Chatham House, une cellule de réflexion internationale, Hussein A. Mahmoud a expliqué qu’en dépit des problèmes politiques et de sécurité qui touchaient la Somalie depuis 20 ans, « les zones frontalières entre le Kenya, la Somalie et l’Ethiopie constituent une zone de commerce de bétail dynamique qui permet à des milliers de personnes de gagner leur vie ».

Le commerce du bétail a également des avantages politiques et sociaux, a-t-il indiqué.

« Les relations de clans transfrontalières qui ont toujours sous-tendu ce commerce laissent place, de plus en plus, à des entreprises commerciales gérées par plusieurs clans », a indiqué M. Mahmoud, ajoutant que cela contribuait à renforcer les liens de confiance et à faciliter l’insertion.

Toutefois, selon M. Mahmoud, le commerce de bétail transfrontalier pose également certaines difficultés pour les autorités, en matière de « développement, de recouvrement d’impôts, et de gestion de la sécurité aux frontières. La principale difficulté consiste à trouver des moyens d’assurer la sûreté et la sécurité aux frontières, ce qui contribuera également à pérenniser et à renforcer ce précieux commerce et les avantages qu’il présente ».

ah/mw/nh

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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