La cardite rhumatismale est l’une des maladies cardiaques les plus répandues en Égypte. Elle met en danger la vie de milliers de personnes, en particulier dans les régions pauvres, indiquent les médecins.
Il s’agit d’une complication de la fièvre rhumatismale, une maladie inflammatoire qui touche généralement les enfants de cinq à 15 ans et endommage les valves cardiaques. Elle survient à la suite d’une angine due à un streptocoque de groupe A.
« C’est la maladie cardiaque du pauvre. Elle est très répandue dans les quartiers pauvres et surpeuplés qui ne sont pas bien aérés. L’infection s’y propage rapidement », a indiqué Alaa al-Ghamrawi, directeur du programme « Rheumatic Heart » du ministère de la Santé pour le gouvernorat de Gharbya, dans le nord du pays.
« Par ailleurs, le système immunitaire des pauvres est souvent plus faible à cause de leur alimentation et ils sont moins sensibilisés sur les questions de santé », a-t-il ajouté.
Le programme « Rheumatic Heart » a pour objectifs de montrer aux médecins qui offrent des soins de santé primaire comment diagnostiquer la fièvre rhumatismale et de former les chefs des communautés pour faire connaître au reste des habitants l’importance d'une bonne aération, d’une alimentation appropriée et d’un traitement adapté, a indiqué M. al-Ghamrawi.
Manque de recherche
Il n’existe pas beaucoup d’informations à jour sur la prévalence de la cardite rhumatismale, a dit Hosam Fawzy, cardiologue à l’Institut national du cœur.
« La plus récente étude sur la prévalence [de la cardite rhumatismale] a été réalisée en 2001 auprès d’écoliers. Elle fait état de 9,4 cas pour 1 000 », a-t-il indiqué. « Sur les quelque 20 millions d’écoliers égyptiens, 188 000 seraient donc atteints de cardite rhumatismale ».
M. Fawzy estime que la prévalence actuelle est beaucoup plus élevée. « Cette étude a été menée auprès d’écoliers. Or, beaucoup d’enfants ne vont pas à l’école et vivent dans des conditions misérables [ce qui les rend encore plus enclins à contracter la fièvre rhumatismale] », a-t-il indiqué, ajoutant que la prévalence pourrait en réalité être quatre fois plus élevée. Si son estimation est juste, il pourrait y avoir plus de 700 000 cas.
« Le financement [de la recherche] provient généralement des compagnies pharmaceutiques. Le problème, c’est que le médicament contre la fièvre est très bon marché, ce qui n’incite pas les compagnies à financer la recherche. Mais les coûts augmentent lorsqu’il faut fabriquer des valves et des filtres [à un stade plus avancé de la maladie] », a ajouté M. Fawzy.
Photo: Dana Hazin/IRIN |
La fièvre rhumatismale est une maladie répandue dans les quartiers pauvres où les maisons sont mal aérées |
Afin d’obtenir une vue d’ensemble plus claire de la situation de la maladie pour pouvoir l’éradiquer, l’Egypt Heart Society, en collaboration avec l’Institut national du cœur et plusieurs universités, a lancé une étude pour déterminer la prévalence de la fièvre et de la cardite rhumatismales ainsi que les facteurs de risque associés.
Onze gouvernorats ont été sélectionnés pour représenter différentes zones géographiques : Gizeh, Qualioubia, Alexandrie, Dakahlya, Menoufya, Gharbya, Port-Saïd, al-Arish, Fayoum, Souhag et Louxor.
Bien que l’étude n’ait pas encore été complétée, les « résultats obtenus chez les écoliers de Qualioubia et d’Alexandrie sont plutôt élevés », a dit Nashwa al-Hagrasy, qui dirige Egypt Hearts, une ONG locale qui offre des soins de santé aux patients pauvres atteints de maladies cardiaques.
« L’étude a démontré que la prévalence de la maladie chez les écoliers du gouvernorat de Qualioubia était de 7,6 pour 1 000 et de 10,8 pour 1 000 chez ceux d’Alexandrie », a-t-elle ajouté.
Coûts élevés
Selon les médecins, les travailleurs atteints de cardite rhumatismale sont particulièrement vulnérables : « le problème avec cette maladie, c’est que les gens qui en sont atteints continuent d’utiliser leur réserve cardiaque. Lorsqu’ils commencent à se plaindre, il est déjà trop tard », a indiqué M. Fawzy.
« Lorsqu’un ouvrier qui travaille sept à huit heures par jour commence à sentir qu’il ne peut plus travailler beaucoup plus que trois heures, son revenu s’en trouve affecté », a-t-il ajouté. « Aussi, ceux qui doivent faire remplacer ou réparer leur valve cardiaque doivent prendre des anticoagulants. Ils doivent éviter tout effort musculaire, car une petite blessure pourrait entraîner une grave hémorragie ».
Cette maladie pourrait également accroître la pression sur le budget alloué à la santé si le nombre de patients atteints continue d’augmenter. « Le remplacement d’une valve pour un seul patient coûte à l’État 32 000 livres égyptiennes [5 700 dollars] tandis qu’une chirurgie à cœur ouvert coûte 10 000 livres égyptiennes [1 784 dollars] », a indiqué Mme al-Hagrasy, ajoutant que des efforts supplémentaires devaient être faits pour prévenir la maladie.
M. Fawzy a estimé qu’une nouvelle approche était nécessaire pour lutter contre la maladie : « Nous devons diagnostiquer les cas le plus tôt possible et, dans le même temps, étudier le microbe qui provoque la fièvre et le tuer... C’est ce que les pays d’Europe et d’Amérique ont fait pour l’éradiquer complètement », a-t-il dit.
« Un vaccin contre la fièvre rhumatismale a déjà été fabriqué en Europe. Nous attendons que les chercheurs d’ici en produisent un qui soit adapté au type de bactérie que nous avons ici en Egypte », a indiqué M. al-Ghamrawi.
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