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Vivre avec l’agent orange

Decades later, the the effects of Agent Orange are still being felt Geoffrey Cain/IRIN
Lorsque des avions américains ont répandu un nuage orange au-dessus de la jungle, autour de lui, pendant la guerre du Vietnam, Tran Thanh Dung ne savait pas que 40 ans plus tard, ses enfants en souffriraient encore. Alors enfant soldat, il combattait dans les rangs du Viêt-Cong, mouvement de guérilla communiste du centre du Vietnam.

« Les avions américains sont arrivés droit sur moi et ont largué un nuage au-dessus de la jungle, et le lendemain, les arbres étaient morts », se souvient-il. « Nous n’avions pas peur. Nous étions perplexes ».

M. Tran a été aspergé d’agent orange, un herbicide utilisé dans les années 1960 et au début des années 1970 par l’armée américaine au Vietnam et au Laos pour détruire les feuillages, afin que les forces communistes ne puissent pas se cacher dans les forêts.

Ce défoliant contenait de la dioxine, une substance chimique qui provoquerait des anomalies congénitales chez les enfants des personnes exposées, selon les experts de la santé. Aujourd’hui, le fils de M. Tran, âgé de 18 ans, souffre de spina bifida, une affection causée, d’après les médecins, par l’exposition de M. Tran à la dioxine au début des années 1970.

Les enfants victimes comme son fils ont « été oubliés », selon M. Tran. Il souhaite que le gouvernement américain dédommage les familles des soldats vietnamiens des effets de l’épandage. « Les problèmes de la guerre ne nous quitteront jamais », a-t-il déploré.

L’héritage du drame

Les Etats-Unis ont épandu quelque 75 millions de litres d’agent orange dans l’ensemble du Vietnam, selon une étude du Government Accountability Office, organisme d’investigation du Congrès des Etats-Unis. La majorité du défoliant a été épandue dans les provinces du centre et du sud du pays, dévastées par la guerre.

Selon les estimations du gouvernement vietnamien, pas moins de 400 000 personnes ont succombé à des maladies provoquées par l’exposition à la dioxine, telles que le cancer.

Le gouvernement estime également que 500 000 enfants présentent des anomalies congénitales, telles que le spina bifida, parce que leurs parents ont été exposés à cette substance.

Le gouvernement américain, pour sa part, continue de nier tout lien entre la vaporisation directe d’agent orange sur les populations, comme ce fut le cas de Tran, et les maladies qui touchent les Vietnamiens.

Les autorités américaines admettent toutefois qu’un être humain peut tomber malade après avoir ingéré de l’eau ou des légumes contaminés.

« Le gouvernement des Etats-Unis recommande un usage sensé de la science », a dit à IRIN Jim Warren, porte-parole de l’ambassade américaine à Hanoi, en allusion à un supposé manque de preuves démontrant l’existence d’un lien tangible entre certaines maladies et l’exposition à la dioxine.

Des progrès

D’autres estiment que des progrès ont été accomplis sur la question de l’agent orange depuis que les Etats-Unis et le Vietnam ont normalisé leurs relations, en 1995.

En 2007, le gouvernement des Etats-Unis et la Fondation Ford, une organisation non gouvernementale (ONG) new-yorkaise, ont en effet commencé à financer des opérations de décontamination à l’aéroport de Danang, un site qui compterait parmi les plus contaminés du Vietnam.

Government-funded centre for agent orange and other disabled children in Danang, central Vietnam
Photo: Geoffrey Cain/IRIN
Un centre pour enfants atteints de handicaps (dont bon nombre ont été causés par l’agent orange), financé par le gouvernement
Danang est la quatrième ville du Vietnam et une des plus pauvres du pays. Pendant les années 1960, l’armée américaine se servait de l’aéroport comme zone de stockage de la dioxine, qui s’est ainsi infiltrée dans les sols et les réserves d’eau locales.

Mais même cette opération de décontamination ne permet toujours pas à certains fermiers de cultiver les terres contaminées, un facteur qui, selon bon nombre de personnes, entrave le développement économique du centre du Vietnam, une région dévastée par la pauvreté.

« Dans certaines zones, désignées comme points chauds, telles que Danang, les populations ne peuvent pas exploiter les terres à des fins agricoles », a dit Vo Quy, ancien directeur du Centre pour la gestion des ressources naturelles et l’étude environnementale de l’Université d’Hanoi, situé dans la capitale.

« Les terres et les forêts sont importantes pour notre pays, et les habitants dépendent de la nature pour vivre. Il est très difficile pour eux de gagner leur vie dans ces régions ».

Les enfants menacés

L’évaluation réalisée en 2009 par un entrepreneur canadien a néanmoins permis de déterminer que la décontamination avait « considérablement » réduit l’exposition humaine. La majeure partie du projet de décontamination devrait commencer cette année.

Malgré tout, d’autres déplorent que le bilan humain de la dioxine demeure.

A Danang, quelque 5 000 personnes, dont environ 1 400 enfants, pourraient être atteintes de maladies causées par leur exposition à la dioxine, selon l’Association des victimes de l’agent orange/la dioxine de Danang, une ONG vietnamienne qui dirige des centres de réhabilitation où sont soignés 100 enfants handicapés.

Selon Nguyen Thi Hien, la présidente du groupe, on ne consacre pas à cette question les fonds qu’elle mérite.

La position du gouvernement consiste à dire que de nombreux habitants ont souffert après avoir été exposés au défoliant.

« Nous avons besoin d’une aide bien plus importante de la part des bailleurs étrangers », a dit Mme Nguyen, ajoutant qu’elle était déçue de constater que les Etats-Unis « n’injectaient pas assez de fonds pour aider directement les victimes ».

Le gouvernement américain a versé un million de dollars pour aider les victimes, sur une enveloppe d’aide de trois millions de dollars consacrée à Danang.

L’intégralité de ces trois millions de dollars a été versée à trois ONG : la Fondation East Meets West, Vietnam Assistance for the Handicapped (VNAH), et Save the Children. Les projets doivent permettre d’offrir des services « sans s’intéresser à la cause des handicaps », a dit à IRIN David Moyer, porte-parole assistant de l’ambassade des Etats-Unis à Hanoi.

« Les Etats-Unis ont versé plus de 46 millions de dollars depuis 1989 pour aider les Vietnamiens handicapés », a ajouté M. Moyer.

gc/ds/mw/nh/ail

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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