Lors d’une conférence organisée à Nairobi, les approches présentées allaient des plus évidentes – ajouter du fer à la farine – aux plus innovantes, comme les chewing-gums enrichis en vitamines.
La vitamine A, le fer et l’iode sont les micronutriments les plus importants en termes de santé publique, d’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS), en particulier pour les enfants et les femmes enceintes des pays pauvres.
La carence en vitamine A, qui affecte plus de la moitié des pays du monde, touche en particulier l’Afrique et l’Asie du Sud-est, et est « particulièrement importante là où la mortalité des enfants de moins de cinq ans est élevée », a dit, lors de la conférence, Sue Horton, économiste spécialiste de la malnutrition.
Cette conférence sur la nutrition, qui s’est tenue à Nairobi le 3 novembre dernier, était organisée par le Copenhagen Consensus Center (CCC), un groupe de réflexion danois.
Le CCC a classé les suppléments en micronutriments parmi les principales priorités de développement, en s’appuyant sur les résultats d’une enquête qu’il avait commandée en 2008 afin d’identifier les meilleurs moyens de dépenser les fonds destinés à l’aide au développement.
Donner de la vitamine A tous les quatre à six mois à des enfants âgés de six mois à cinq ans permettrait de réduire leur mortalité de 23 pour cent, a ajouté le groupe de réflexion.
Actuellement, la carence en vitamine A est la principale cause de cécité évitable chez les enfants, et multiplie les risques de maladie et de mortalité liée à des infections sévères. Chez les femmes enceintes, elle provoque la cécité nocturne et peut augmenter le risque de mortalité maternelle, d’après l’OMS.
D’après le CCC, à l’échelle mondiale, jusqu’à 219 millions d’enfants sont susceptibles de souffrir d’une carence en vitamine A, et plus d’un milliard de personnes d’une carence en zinc.
Les suppléments ne sont pas la seule réponse possible
Selon les experts présents à la conférence, les systèmes utilisés actuellement, qui consistent à donner des vitamines à l’aide de suppléments, manquent souvent certaines cibles visées.
« [Le travail de] proximité est important dans les régions reculées et auprès des populations en déplacement, car on ne peut pas compter uniquement sur les journées de vaccination », a dit Mme Horton.
Le Kenya, par exemple, parvenait à distribuer de la vitamine A deux fois par ans avec un taux de couverture 80 pour cent, grâce à des campagnes de vaccination mobiles. A partir de 2007, les suppléments n’ont plus été distribués que dans les installations de santé. Le taux de couverture a alors chuté à 20 pour cent chez les enfants de six à 59 mois, a indiqué Mme Horton. Un déclin comparable a été observé en Inde.
Photo: Jaspreet Kindra/IRIN |
La consommation d’aliments nutritifs disponibles localement peut contribuer à faire reculer la malnutrition (photo d’archives) |
« Les programmes de proximité peuvent être particulièrement rentables quand la distribution de suppléments en vitamine A est associée à d’autres services tels que les traitements vermifuges, la distribution de moustiquaires, etc. », a noté le CCC.
Pour Shawn Baker, vice-président d’Helen Keller International, il faudrait institutionnaliser davantage d’interventions annuelles visant les enfants, afin d’éviter de laisser certains enfants de côté lors des habituelles journées de la santé de l’enfant.
« Nous devons réfléchir non seulement à ce que nous sommes capables de bien faire, mais aussi à ce que nous sommes capables de bien faire à grande échelle », a dit M. Baker.
Enrichissement des aliments
De telles interventions pourraient comprendre notamment l’enrichissement ou l’ajout de nutriments à des aliments très répandus. D’après le CCC, l’iodation du sel et l’enrichissement de la farine en fer sont des procédés peu coûteux.
En Afrique de l’Ouest, une initiative régionale vise à promouvoir l’enrichissement de la farine de blé en acide folique et de l’huile alimentaire en vitamine A.
« Ces procédés pourraient permettre de distribuer des nutriments essentiels à un grand nombre de personnes », a dit Kodjo Gbemou, directeur des Grands moulins du Togo, une société de meunerie.
La farine de blé est fabriquée industriellement, tandis que les autres céréales cultivées localement sont transformées de façon artisanale par les habitants, a expliqué M. Gbemou. Les pays d’Afrique de l’Ouest, a-t-il ajouté, accélèrent actuellement les processus de réglementation afin de rendre l’enrichissement obligatoire, comme c’est déjà le cas en Côte d’Ivoire et au Sénégal.
Chewing-gum
A l’échelle mondiale, les entreprises privées développent également des produits innovants permettant d’apporter des micronutriments. La société danoise Gumlink a ainsi mis au point un chewing-gum à la vitamine A.
Ce chewing-gum, fabriqué au moyen d’un processus sec et froid afin de protéger la vitamine A, sensible à la chaleur, est sans sucre et se digère facilement. Il se présente sous deux formes : une adaptée aux enfants de trois à cinq ans, et l’autre aux femmes en période de grossesse ou d’allaitement.
« La carence en vitamine A, qui affecte plus de la moitié des pays du monde, touche en particulier l’Afrique et l’Asie du Sud-est » |
« Notre idée est de tirer parti de notre savoir-faire technologique pour mettre au point un nouveau moyen de fournir un apport en vitamine A à ceux qui en ont besoin. »
Traitements vermifuges
Parmi les autres interventions efficaces, on peut citer la distribution régulière de traitements vermifuges. Ces traitements fonctionnent bien, car les parasites empêchent les nutriments d’être totalement digérés.
« A grande échelle, ces traitements sont sans risques et peu coûteux… Leur coût de revient est d’environ 15 centimes de dollars américain par enfant si on les administre dans les écoles, et de 25 centimes s’ils sont dispensés à des enfants qui n’ont pas encore l’âge d’être scolarisés, lorsqu’on les associe à une autre intervention dans le cadre de programmes tels que les Journées de la santé de l’enfant ou au sein d’installations de soins de santé de base », a indiqué le CCC dans un article.
La conférence de Nairobi a appelé à améliorer la nutrition au niveau communautaire, notamment en utilisant les aliments nutritifs disponibles localement et en développant l’éducation à l’allaitement.
Pour Bjorn Lomborg, directeur du CCC, de telles pratiques sont cruciales dans un monde où la concurrence et les contraintes de financement dictent leur loi. « Comment obtenir le meilleur retour sur investissement ? », a-t-il demandé.
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