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Nouveaux déplacements de population à craindre avant la fin du mandat de la présidente

Les rebelles séparatistes musulmans devraient intensifier les attaques de la guérilla, ciblées contre les représentants du gouvernement et les civils au cours des prochains mois, ce qui devrait provoquer de nouveaux déplacements de population et causer davantage de souffrances sur l’île de Mindanao, dans le sud du pays, ont averti les analystes.

« Nous nous attendons à de nouveaux déplacements de population, à mesure que le gouvernement poursuit ses opérations de "poursuite à chaud" contre le MILF (Front moro de libération islamique)», a indiqué à IRIN Rommel Banlaoi, directeur exécutif de l’Institut philippin de recherche sur la violence politique et le terrorisme, une cellule de réflexion. « Je ne pense pas que le MILF reviendra à la table des négociations sous le gouvernement actuel ».

Selon M. Banlaoi, le « cadre » de tous pourparlers de paix à venir a été radicalement inversé par la présidente Gloria Arroyo : celle-ci insiste en effet pour que les rebelles du MILF désarment et livrent les francs-tireurs aux autorités avant que de nouveaux pourparlers ne soient engagés. Ce changement de position « marque une rupture claire » avec les précédentes négociations, entachées par les violations d’un cessez-le-feu conclu en 2003.

« Le cadre [des négociations] a changé. Je pense qu’aujourd’hui, la position du gouvernement philippin est très ferme. Il veut écraser les rebelles », a-t-il estimé.
Le changement de position apporté par Mme Arroyo est intervenu peu après les raids menés par deux commandants dissidents du MILF dans les villes et les villages de Mindanao, en août, pour protester contre une injonction de la Cour suprême interdisant l’exécution d’un protocole d’entente portant sur le contrôle d’un territoire ancestral. Ledit protocole aurait permis aux rebelles de contrôler le développement politique et économique de quelque 700 villes et villages, occupés pour bon nombre par des populations chrétiennes.

Ces attaques avaient fait plus de 100 morts au sein des populations civiles ; de nombreux commerces avaient également été ruinés et 500 000 personnes avaient été touchées au plus fort des hostilités, en août et septembre, selon le Conseil national de coordination de la gestion des catastrophes.

Bien qu’une accalmie globale ait été observée, les tirs de rue se poursuivent dans plusieurs villes et provinces de Mindanao, et près de 100 000 personnes vivent encore dans des camps pour personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays (PDIP). Le coût de la guerre grève également les finances de l’armée.

Arrêt de la cour

Le 14 octobre, la Cour suprême a rendu un arrêt final, annulant l’accord. En réaction, le MILF a fait savoir qu’il ne reconnaissait pas cet arrêt, et averti que s’il n’entendait pas ordonner l’assaut total, il ne s’opposerait pas aux commandants contrariés qui décideraient d’attaquer les positions de l’armée.

« Nous ne savons pas si le nouveau gouvernement qui succèdera à [Gloria] Arroyo envisagera de nouveau l’accord, mais une chose est claire : nous ne voyons pas progresser les pourparlers de paix engagés sous le gouvernement actuel. Et tandis que nous comptons les jours [jusqu’aux élections de mai 2010], les déplacements vont se poursuivre », a indiqué M. Banlaoi.

L’International Crisis Group (ICG), un organisme sis à Bruxelles qui analyse les conflits dans le monde, a indiqué le 23 octobre, dans un document directif, que la tâche immédiate du gouvernement devrait être « d’empêcher l’intensification » des hostilités et de décourager les populations civiles et les autorités locales de Mindanao d’armer les civils qui craignent de nouvelles attaques de la part du MILF.

Selon l’organisme, il est peu probable qu’une « guerre totale » éclate à travers Mindanao, les parties belligérantes n’ayant ni l’une, ni l’autre les ressources nécessaires pour « se livrer à un combat soutenu ». L’armée a annoncé qu’elle avait déjà dépensé plus de 12,5 millions de dollars de carburant et de munitions depuis le début des opérations, en août, sans compter le versement d’indemnités aux familles des soldats blessés ou tués.

Mais selon l’ICG, les militants indonésiens connus pour opérer dans certaines zones aux mains du MILF pourraient « décider de prendre des mesures de représailles. Un bombardement urbain de grande envergure risquerait à son tour de déclencher un conflit à bien plus grande échelle », a averti l’ICG. L’organisme n’a pas précisé à quel mouvement appartenaient les militants indonésiens, mais des responsables des services de renseignement militaires ont expliqué à IRIN que des dizaines de militants indonésiens de la Jemaah Islamiyah (JI) se trouvaient à Mindanao. La JI, connue pour être le bras d’al-Qaeda en Asie du Sud-Est, aurait été à l’origine des attentats à la bombe de 2002, à Bali, qui avaient fait 200 morts.

« À l’avenir, quand les pourparlers de paix reprendront, s’ils reprennent, le gouvernement devra mieux s’assurer d’éviter que certains facteurs potentiels ne viennent enrayer le processus, par la consultation ou la cooptation, et en tenant ses promesses », a indiqué l’ICG, soulignant que la rupture des pourparlers reposait sur « de profonds soupçons quant à la substance » de l’accord proposé. « Il sera très difficile de revenir sur cet accord en tant que point de départ de la prochaine série [de pourparlers]. Selon le MILF, cet accord est une affaire conclue et aucune renégociation ne saurait être acceptée ».

De l’avis général, « aucun mouvement ne sera possible tant qu’un nouveau président ne sera pas entré en fonctions », d’après l’ICG.

En outre, selon un rapport daté du 29 octobre et publié par l’organisme de défense des droits humains Amnesty International, les violations des droits humains sont désormais endémiques à Mindanao, et la situation est de plus en plus grave dans de nombreux centres d’évacuation où s’est rendue l’organisation. Dans une région, a indiqué Amnesty, les soins médicaux sont insuffisants malgré la présence de plusieurs infirmières et sages-femmes. « Des cas d’enfants décédés des suites de diarrhées sont signalés dans certains centres », a indiqué l’organisme. Amnesty a également déclaré avoir reçu des informations selon lesquelles des bombardements menés par l’armée dans les zones soupçonnées d’être tombées aux mains du MILF auraient fait des victimes au sein des populations civiles.

« Amnesty International appelle le gouvernement à enquêter sur les cas déclarés de blocus alimentaires ou de restrictions imposées par les représentants des autorités locales sur l’acheminement de l’aide, et à assurer que les différends politiques locaux n’entravent pas l’envoi de l’aide aux populations déplacées », a demandé l’organisme.

jvg/mw/nh/vj


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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