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Violences post-électorales – Des victimes parlent

Les agresseurs d’Yvonne Chipowera l’ont battue, violée et aspergée d’urine pendant 16 heures, tout cela parce qu’elle soutenait le Mouvement pour le changement démocratique (MDC), parti d’opposition zimbabwéen.

La jeune femme a raconté qu’une trentaine de miliciens fidèles au président Robert Mugabe et à son parti, la ZANU-PF, étaient entrés par effraction chez elle, à Epworth, une vaste commune située à la périphérie d’Harare, la capitale, le 9 juin dernier.

Ils ont commencé par emmener cette jeune militante du MDC, âgée de 24 ans, au domicile présumé d’un leader local de la ZANU-PF, la battant tout le long du chemin.

« Trois hommes me bousculaient pendant qu’on marchait. Ils m’ont emmenée loin de la route et m’ont bandé les yeux. Un homme m’a tenu les bras, un autre m’a cloué les jambes à terre et un troisième m’a violée », a-t-elle raconté à IRIN.

Quand ils ont eu terminé, ils ont continué à marcher jusqu’à la maison, qui sert de base aux miliciens de la ZANU-PF, selon les habitants du quartier.

Yvonne Chipowera a été conduite de force dans une pièce où se trouvaient déjà un groupe d’autres prisonniers ; d’autres encore étaient retenus dans un trou, creusé dans le jardin, a-t-elle rapporté.

Depuis la victoire du MDC aux élections législatives du 29 mars, et celle de Morgan Tsvangirai, chef du parti, face au président Mugabe au premier tour du scrutin présidentiel, Epworth, ainsi que d’autres banlieues urbaines, sont devenues des zones interdites pour l’opposition, un phénomène qui reflète la campagne de terreur dénoncée par les associations de défense des droits humains dans les régions rurales.

Selon le MDC, les miliciens de la ZANU-PF, armés de lance-pierres et de couteaux, pourchassent ceux qu’ils considèrent comme leurs opposants, forçant des centaines de personnes à fuir pour éviter d’être capturées. Les malchanceux sont conduits dans l’un des « centres de réorientation » de la commune.

« Ils m’ont jeté de l’eau froide, et les hommes m’ont uriné sur la tête. Ils m’ont forcée à dire que Tsvangirai était un trou du ***, un chien, plein de noms d’oiseaux. Je l’ai dit, bien sûr, parce qu’ils me frappaient », s’est souvenue Yvonne Chipowera.

« Ils m’ont violée de nouveau, et puis ils m’ont remise dans la pièce ; ils m’ont battue à coups de fouet, en me lacérant le dos, les fesses et les jambes. Toute la nuit, ils m’ont donné des coups de poing, de pied, des gifles ».

Yvonne Chipowera a été libérée à cinq heures du matin, le 10 juin. Elle a pu retrouver son petit garçon, qui avait passé la nuit dehors, devant leur domicile, dans le froid de l’hiver.

« J’espère que Dieu les emportera et les tuera tous », dit-elle, en tenant son fils dans ses bras. « Maintenant, j’ai peut-être le VIH/SIDA, tellement ces hommes étaient sales ».

Des violences organisées

Pour Yvonne Chipowera, ce sont les dirigeants de la ZANU-PF à Epworth qui ont orchestré ces violences.

Tandis qu’on la torturait, elle a pu reconnaître un ancien ministre, qui se trouvait dans la maison, mais les miliciens agissaient sous les ordres d’une conseillère locale, a-t-elle rapporté.

Cette même conseillère locale a également été nommée par une autre habitante d’Epworth, interviewée par IRIN la semaine alors qu’elle se remettait de ses blessures.

Cette dernière, une responsable du MDC âgée de 38 ans, qui a requis l’anonymat, avait été attrapée le même jour qu’Yvonne Chipowera. La première fois, elle avait réussi à s’en tirer avec un simple passage à tabac, infligé par les miliciens, qui avaient également pillé son domicile.

Enceinte de deux mois, elle avait décidé de fuir Epworth, en compagnie d’une autre militante du MDC. Vêtue d’un T-shirt pro-Tsvangirai, elle avait néanmoins été interceptée.

« Ils étaient plus d’une cinquantaine. Ils nous ont emmenées au cimetière de la route de l’Aérodrome [à Harare]. Ils m’ont mis un bandeau noir sur les yeux et m’ont violée. Ils m’ont uriné sur le visage et ont introduit leurs sexes dans ma bouche. J’avais du sperme sur le visage », a-t-elle raconté.

« J’essayais de les repousser, mais ils m’ont brûlée avec un fil chaud, qu’ils avaient fait chauffer sur un feu. Ils ont violé l’autre femme, aussi. Elle a été violée par trois hommes et elle saignait. Ils nous donnaient des coups de pied ; ils disaient "Tu veux que Tsvangirai devienne président. Tu veux vendre notre pays aux blancs" ».

IRIN n’a pas pu vérifier les récits de ces deux femmes, mais ils correspondent aux actes d’extrême violence qui auraient été commis par des soldats, des représentants des forces de l’ordre et des militants du parti au pouvoir.

Des violences auraient également été perpétrées par le MDC à l’encontre des partisans de la ZANU-PF et des prétendus « vétérans de la guerre », mais dans une bien moindre mesure.

D’après le MDC, 86 de ses partisans ont été tués depuis les élections générales du 29 mars. Nelson Chamisa, porte-parole du parti, a déclaré à IRIN que ces « violences cautionnées par l’Etat » avaient fait plus de 200 000 déplacés et 10 000 blessés, et détruit plus de 20 000 logements.

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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