Tous les matins, dans la cour sablonneuse du centre de santé de Koro, un village situé à 800 kilomètres de Bamako, la capitale malienne, le bruit du moteur d’une moto vient troubler pendant quelques minutes la quiétude des habitants.
« Nous partons à Segue Bengou en Stratégie avancée », a expliqué Yana Yanali, tout en plaçant des paquets de moustiquaires imprégnées sur le guidon de la moto. « Nous sortons chaque jour de la semaine car il y a 41 villages dans la zone que nous devons couvrir tous les mois ».
Assise à l’arrière de la moto pilotée par l’aide-soignant Yousouf Dama, Yana Yanali démarre sa mission en empruntant les routes en latérite.
La « Stratégie d’accélération de la survie et du développement de l’enfant (SASDE) » a été créée en 2002 par le gouvernement malien et ses principaux donateurs pour mettre fin au déclin humanitaire du pays. Le Mali est un des pays où le taux de mortalité est l’un des plus élevés au monde.
Selon le Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA), une femme malienne meurt en couche toutes les trois heures. De même, un enfant sur cinq meurt de diarrhée, de paludisme ou de maladies liées à la malnutrition, avant son cinquième anniversaire, des pathologies qui pourraient être évitées grâce à un investissement minimum.
Ces statistiques sont encore plus alarmantes dans les zones rurales où peu de personnes ont accès aux services et structures sanitaires de base et ont les moyens de se soigner même lorsque ces structures existent.
En 1990, le gouvernement malien avait pris une série de mesures pour décentraliser l’accès aux soins. Les centres de santé communautaires, entièrement financés par les communautés villageoises elle-mêmes, avaient alors étés créés.
Dix ans plus tard, le bilan est plutôt décevant en raison de la faible fréquentation des centres de santé.
« On s’est aperçu que cela n’avait permis de réduire la mortalité infantile que de un pour cent », a expliqué le docteur Fayiri Togola, conseiller technique du Fonds des Nations Unies pour l’enfance, UNICEF, auprès de la direction régionale de la santé de Mopti.
La région de Mopti, dont dépend le village de Segue Bengou est un bon exemple. Malgré les quelque 1,8 million d’habitants, cette région ne compte que 123 centres de santé répartis sur 80 000 kilomètres carrés.
Le gouvernement malien ne consacre que 4,8 pour cent de son produit national brut aux dépenses de santé, soit 39 dollars par an et par personne, selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).
Dans le cadre de la nouvelle stratégie, le gouvernement a constitué des unités mobiles. Pour les villages situés à moins de 15 kilomètres du centre de santé, les unités se déplacent en moto. Quand les villages sont à plus de 25 kilomètres, les unités sont composées d'un chauffeur, d'une matrone et d'un aide-soignant qui se déplacent en voiture et effectuent des tournées hebdomadaires dans ces localités.
Mise en place par le gouvernement malien, avec l’appui de l’UNICEF, cette stratégie avancée vise à réduire les taux de mortalité maternelle et infantile.
« Dans ce contexte, nous avons pensé que pour réduire la mortalité de 50 pour cent, il était important de ne pas nous concentrer uniquement sur les centres de santé, mais d’aller au plus prêt des populations », a expliqué M. Togola.
A chaque fois, il s’agit de remplir la même mission : assurer la vaccination des enfants, la consultation prénatale, la sensibilisation des familles à l’utilisation et la consommation d’eau potable, ainsi que la détection de maladie chez leurs enfants. Des moustiquaires imprégnées sont également distribuées à chaque femme et enfant pour prévenir le paludisme, très fréquent au Mali.
Certes, il est encore trop tôt pour savoir si cette stratégie portera effectivement ses fruits, ont indiqué les autorités. Une enquête va être menée dans le courant de l’année 2007 pour voir les effets de la SASDE sur la mortalité maternelle et infantile.
M. Togola de l’UNICEF craint que l’enquête ne révèle qu’une faible amélioration de la situation, étant donné l’ampleur du problème et l’absence d’investissements dans le domaine de la santé et de l’éducation au Mali.
« Je pense que nous avons encore beaucoup de défis à relever, dont le changement de comportement durable des populations cibles, pour que les ménages aient eux-mêmes le réflexe d’organiser leur prise en charge », a-t-il conclu.
L’Afrique de l’Ouest a le taux de mortalité maternelle et infantile le plus élevé au monde, et dans plusieurs pays de la région ce taux est en constante augmentation, malgré les centaines de milliers de dollars de la communauté internationale et de l’aide au développement.
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