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Des hôpitaux trop vétustes pour offrir des soins de qualité

[Ghana] Korle Bu Hospital in Accra. The main hospital in Ghana. IRIN
Le travail d'Elizabeth Nunoo à l'hôpital de Korle Bu, à Accra, est éreintant, mais aussi dangereux
Le service maternité situé au troisième étage de l’hôpital de Korle Bu est étrangement calme, seule une fuite d’eau vient de temps à autre troubler ce silence.

Une femme sur le point d’accoucher est débout, appuyée sur un brancard près d’un mur humide et moisi. Allongée sur un lit, sous lequel se trouve une flaque d’eau stagnante, une autre femme gémit et attend de subir une césarienne. Puis, elle lève la tête et lance à un visiteur : « Je n’en peux plus de cette puanteur ».

L’hôpital de Korle Bu, le plus grand centre hospitalier universitaire du Ghana, a été construit en 1923 et fut à l’époque le plus prestigieux hôpital de l’Afrique de l’Ouest. Il est composé de seize services et centres de diagnostic, a une capacité totale de 1 600 lits et une superficie équivalente à celle de cinq terrains de football.

Aujourd’hui, la plupart des bâtiments de l’hôpital tombent en ruine.

« Notre système de soins de santé remonte à l’époque coloniale, nous avons besoin de financements pour pouvoir le mettre aux normes internationales actuelles », a déclaré Kofi Amponsah Bediako, porte-parole du ministère de la Santé.

Des conditions qui se détériorent

L’Etat a augmenté ses subventions pour tenter de réhabiliter l’hôpital de Korle Bu et les autres centres hospitaliers du pays, mais selon les analystes politiques, cette aide est insuffisante.

« Les problèmes d’infrastructure sont tels qu’ils nécessitent un investissement cohérent et à long terme », a souligné Sulley Gariba, directeur de l’Institute for Policy Alternatives, un groupe de réflexion ghanéen qui se consacre à la politique publique.

Par exemple, au cinquième étage de l’hôpital, au niveau du bloc opératoire, l’ascenseur ne fonctionne plus depuis le mois de février suite à une panne du générateur de secours, qui n’a toujours pas été réparé.

Un chirurgien a confié, sous le couvert de l’anonymat, qu’une coupure de courant s’était produite un jour alors qu’il était en train d’opérer une patiente.

« J’ai dû arrêter l’opération », a-t-il indiqué. « Je me suis servi de la lumière de mon téléphone portable pour recoudre rapidement la patiente », a-t-il ajouté.

Dans les hôpitaux des autres villes du Ghana, les conditions sont encore plus déplorables. Par exemple, en octobre dernier, à l’hôpital de Tamale, la plus grande ville du nord du Ghana, les corps ont dû être posés à même le sol, après une panne du système de réfrigération de la morgue.

« Le budget de l’hôpital était insuffisant pour le faire réparer », a regretté Daniel Tapang, directeur de l’hôpital.
Les habitants se sont plaints des odeurs pestilentielles, si bien que les autorités ont décidé de ne plus accepter de nouveaux corps, a précisé M. Tapang.

« Cette décision a été difficile à prendre. Nous avons conscience des problèmes sanitaires que rencontrent les familles, elles doivent elles-mêmes trouver des solutions pour préserver le corps jusqu’à l’enterrement. Mais en raison des circonstances, nous n’avions pas d’autre choix », a-t-il poursuivi.

Les patients boudent les hôpitaux publics

Selon les professionnels de la santé, les Ghanéens sont de moins en moins nombreux à se rendre dans les hôpitaux publics et les malades les plus fortunés préfèrent se faire soigner dans des cliniques privées.

D’après les données recueillies par l’Institute for Policy Alternatives, au moins 30 pour cent des soins de santé au Ghana sont assurés par les hôpitaux de missionnaires.

Par ailleurs, les Ghanéens sont de plus en plus nombreux à faire appel aux services de tradipraticiens et seulement 43,8 pour cent d’entre eux consultent un médecin qualifié lorsqu’ils tombent malades.

La population ghanéenne se plaint non seulement de la mauvaise qualité des services de santé financés par l’Etat, mais également des tarifs pratiqués. En effet, une opération chirurgicale coûte entre trois et 20 millions de cédis ghanéens (340 à 2 267 dollars américains) – des sommes que ne peut payer un grand nombre de patients.

En 2004, le gouvernement a lancé un système national d’assurance maladie grâce auquel tout Ghanéen peut bénéficier d’une couverture médicale généralisée en s’acquittant d’une cotisation annuelle de seulement 72 000 cédis (9 dollars américains). Mais deux ans après la mise en place de ce programme quelque peu ambitieux, au moins 17 millions de Ghanéens n’y ont toujours pas adhéré.

Pour beaucoup, la piètre qualité des services de santé ne justifie pas le montant de la cotisation et les démarches d’adhésion sont trop complexes.

Le gouvernement reconnaît que le système présente des défauts.

« Nous savons très bien que le système pose de sérieux problèmes », a affirmé M. Bediako.

Toutefois, le gouvernement est sur le point d’apporter des solutions.

« Mais nous allons régler ces problèmes », a-t-il déclaré.

Quelques investissements pour redonner de l’espoir

Le gouvernement vient de débloquer des fonds afin de réhabiliter les services hospitaliers du pays. Cette année, 150 milliards de cédis (17 millions de dollars) seront consacrés au système de santé, soit presque deux fois plus qu’en 2005 et trois fois plus qu’en 2004.

Les fonds seront versés via le Ghana Health Service, une agence gouvernementale autonome, et « serviront en priorité à la réhabilitation des structures existantes et à la construction de nouveaux services dans les régions mal équipées », conformément au projet défini sur cinq ans par le gouvernement.

Selon les bailleurs de fonds, le gouvernement ghanéen a encore besoin d’aide. Ainsi, l’Union européenne a alloué une enveloppe de 55 millions d’euros (71 millions de dollars américains) destinée à la création d’un service d’urgences au centre hospitalier universitaire de Komfo Anokye, à Kumasi, la deuxième grande ville du pays.

De plus, le gouvernement prévoit d’ouvrir un nouveau service de maternité et de pédiatrie ainsi qu’une école d’infirmière. L’hôpital de Komfo Anokye deviendrait alors le plus grand centre hospitalier du pays.

En ce qui concerne les fuites d’eau constatées dans le service maternité de l’hôpital de Korle Bu, cela fait deux ans que des rénovations sont prévues, mais les travaux n’ont toujours pas commencé.

Mustapha Salifu, porte-parole de l’hôpital, a indiqué que de nouveaux projets de rénovation de tout l’hôpital étaient en cours.

« La proposition est toujours à l’étude et nous espérons que les travaux pourront bientôt démarrer », a-t-il souligné.

Mais certains craignent que ce projet, ainsi que d’autres réparations urgentes, ne se concrétisent.

« Si seulement cet argent est injecté de manière systématique dans le secteur de la santé pendant les cinq prochaines années, alors nous aurons réussi à résoudre ces problèmes », a affirmé Sulley Gariba, de l’Institute for Policy Alternatives.

« Les groupes de la société civile doivent exercer davantage de pression pour contraindre le gouvernement à tenir ses engagements », a-t-il dit.

Naa Adorkor, la sage-femme surveillante du service maternité de l’hôpital de Korle Bu, a conduit les équipes d’IRIN jusqu’à la pièce où se trouve la source de la fuite : de l’eau jaillit d’une conduite percée, emplit l’espace d’une odeur putride et s’infiltre lentement dans les étages inférieurs de ce bâtiment vieux d’une centaine d’années.

« Cet endroit est censé être stérilisé et propre », a-t-elle rappelé, une fois revenue dans son bureau, alors que de l’eau goutte près des étagères où sont stockés les médicaments et le matériel médical. « Comment peut-on faire naître des bébés dans un endroit pareil ? », s’est-elle indignée.

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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