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La Bible et le Coran pour imposer l'abstinence

[Cote d'Ivore] Ivorian religious leaders attending the opening ceremoy of Cote d'Ivore's national reconciliation held in Abidjan from 9 October to 18 December 2001. IRIN
Les leaders religieux ivoiriens ensemble pour promouvoir l'abstinence contre le sida
Comment prévenir de nouvelles infections au VIH en Côte d’Ivoire sans inciter les populations à la débauche sexuelle ? En prônant l’abstinence, affirment en choeur les responsables religieux ivoiriens. Assis face à ses fidèles, El Hadj Siriman Konaté, l’imam de la grande mosquée d'Agboville, une bourgade située à 40 kilomètres de la capitale économique, fixe du regard ses fidèles. En ce jour de grande prière, il assène un vibrant : «Frères et soeurs musulmans, l'islam a prescrit pour nous l'abstinence sexuelle jusqu'au mariage. Nous devons nous en tenir à cela». El Hadj Siriman Konaté fait partie des signataires de l’Alliance des religieux ivoiriens, une initiative conjointe lancée en avril par des représentants des confessions pratiquées en Côte d’Ivoire et destinée à améliorer la situation des personnes vivant avec le VIH/SIDA et à renforcer les moyens de prévention des acteurs communautaires. Le but de ce réseau : «Eviter l’éparpillement des messages contre le sida», selon ses promoteurs, qui s’alarment de la propagation rapide du VIH dans un pays en guerre, où le taux de prévalence du VIH atteint des seuils alarmants, notamment dans le nord où il dépasserait la moyenne nationale, estimée à sept pour cent de la population. L’Alliance est soutenue par l’université John Hopkins de Baltimore, aux Etats-Unis, et le plan d'urgence américain pour la lutte contre le sida du Président George Bush (Pepfar) -- dont la Côte d’Ivoire est l’un des 15 Etats bénéficiaires et qui promeut l’abstinence comme le moyen le plus fiable de se protéger contre le VIH. A l’image du pays, coupé en deux par une rébellion armée depuis septembre 2002, le message délivré par les religieux est pourtant multiple, parfois radicalement différent d’une confession à l’autre, ce qui lui fait perdre de sa consistance et dilue son impact sur les fidèles, ont estimé des responsables. «Pendant longtemps, le sida est resté tabou en raison de la question du sexe. Mais aujourd'hui, il est impérieux de sensibiliser : à défaut du port du préservatif, il faut faire un effort pour adopter l'abstinence ou la fidélité», a ainsi expliqué l'imam Siriman Konaté. Comme beaucoup de personnalités religieuses, l’imam préfère privilégier l’abstinence et la fidélité, et reste prudent vis-à-vis de l’utilisation du préservatif, le moyen de prévention du VIH/SIDA pourtant considéré comme le plus sûr. «Si vous n'êtes pas mariés, ne vous engagez pas à l'acte sexuel. Dans le cas contraire, accepter d'épouser la femme avec qui vous avez accompli l'acte. Car le sida, on ne cessera de vous le rappeler, fait des ravages. Je m'adresse surtout à vous, les jeunes !», a asséné l’imam à ses fidèles lors de la grande prière des musulmans, vendredi. Un message confessionnel brouillé Le révérend Marc Teddy, de la paroisse de Koumassi Remblais, l’un des quartiers d’Abidjan, est également membre de l’Alliance. Pourtant, il trouve regrettable d’insister sur l’abstinence comme le meilleur moyen de se protéger contre le sida. «La restriction à l'abstinence n'est pas l'idéal : la société a atteint un niveau où l'abstinence semble être une méthode difficile à adopter par les hommes. Il nous faut explorer d'autres voies de sensibilisation comme le préservatif ou la fidélité», a expliqué le révérend Teddy. Mais sans formation ni soutien financier particulier, les responsables religieux avancent seuls et souvent en ordre dispersé sur le terrain miné de la prévention du sida, où le préservatif n’a pas bonne presse et le sexe demeure un sujet à eviter. «Le sexe est resté un sujet tabou dans certaines religions, ce qui a participé à sa pratique incontrôlée», a ainsi estimé Odette Tra Lou, une fidèle de l'Eglise protestante baptiste d’Abidjan. «Pour nous, il ne doit plus avoir de honte à évoquer le sida. L'abstinence avant le mariage, nous l'imposons dans nos églises, le port du préservatif est conseillé, ainsi que la fidélité.» L’abbé Jacques Martin, de l’église catholique romaine, est tout aussi compréhensif, lui qui promeut (et impose) le test du VIH avant tout mariage. «S'ils ne peuvent s'abstenir ou être fidèles, le test exigé au mariage peut au moins contraindre à changer les comportements. De toute évidence, on fini toujours par être emmené à adopter une des méthodes contraceptives», a admis l’abbé Martin. Officiellement pourtant, le message religieux inter-confessionnel privilégie l’abstinence : «C'est une obligation biblique et coranique. Il est dit dans les saintes écritures que l'homme doit s'abstenir jusqu'au mariage», a rappelé le pasteur méthodiste, André Yohou. Et le pasteur, radical, d’insister : «Tant que nous n'imposons pas cela à nos fidèles, il y a peu de chance de parvenir à un résultat probant.» Se rapprocher des patients, un objectif consensuel En attendant de structurer leurs campagnes d’information et de coordonner leurs messages, les responsables religieux ivoiriens ont décidé de se rapprocher des personnes vivant avec le VIH/SIDA, des rencontres jugées indispensables pour les hommes de Dieu. «Il s'agira pour nous de faire de la prévention par la sensibilisation, d’écouter, de prier et de consoler les personnes vivant avec le VIH», a expliqué l'imam Djiguiba Cissé. «Nous allons combattre leur rejet car le malade ne doit pas être diabolisé mais entouré d'amour.» Selon le président de l’Alliance, l'Abbé Gustave Adou, certaines pratiques traditionnelles, telles que l’excision ou le lévirat (qui consiste à donner la femme au frère de son mari à la mort de ce dernier), devront être progressivement abandonnées pour se rapprocher des personnes vivant avec le sida. «Autrement, il nous serait impossible d'échanger ouvertement avec les personnes vivant avec la maladie», a-t-il expliqué. Très solidement implantées en Côte d’Ivoire, les Eglises évangéliques sont pionnières en la matière et conduisent activement des programmes de lutte contre le sida via des séminaires, des conférences et des séances de prière, selon le pasteur Kouakou Prao, de la Fédération des Eglises méthodistes de Côte d’Ivoire. «Nous organisons ce genre de rencontres avec les fidèles pour des enseignements sur la maladie. Pour les couples non-mariés, l’abstinence leur est proposée et un suivi est exigé. Nous recevons également des malades pour lesquels nous prions», a précisé le pasteur. Pour lui, le sida est pourtant «une maladie comme toutes les autres, qui s'attrape». «Si nous ne comportons pas correctement au niveau sexuel, il est normal qu'on soit infecté. Il existe beaucoup d'autres voies d'infection mais les rapports sexuels, on le sait, exposent plus.» Mais puisque que de nombreux patients parcourent chaque jour les mosqués, les églises et autres temples à la recherche de solutions, «ils ont besoin de notre soutien et de nos prières» toute chose que le pasteur Kouakou Prao «ne peut que leur accorder».

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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