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Sans subventions du carburant, l'aide aux déplacés irakiens est compromise

A little girl plays in a tent in Harsham IDP camp, in Erbil, capital of Iraqi Kurdistan. The camp is home to more than 1,000 people displaced by the advance of Islamist militants.  Overhead, storm clouds gather, a reminder of the harsh winter yet to come Louise Redvers/IRIN

En Irak, la perspective de dépenses en carburant cinq fois plus élevées que l'an dernier inquiète les organisations humanitaires, qui ont déjà un budget réduit. Elles craignent de ne pas pouvoir aider les centaines de milliers de personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays (PDIP) qui vivent dans des tentes et des abris, alors que l'hiver approche.

« C'est une préoccupation majeure et le temps presse. Nous attendons avec impatience la décision concernant les subventions et nous espérons qu'elle sera rendue immédiatement », a déclaré Edward Colt, responsable de l'information auprès du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) en Irak.

Le gouvernement irakien n'a pas encore annoncé s'il allait reconduire les subventions cette année. L'hiver dernier, ces subventions avaient permis de réduire le coût du kérosène que les organisations humanitaires distribuent aux personnes déplacées par les combats en Syrie et en Irak - qui s'en servent pour cuisiner et se chauffer. Ainsi, le prix du marché (actuellement de 90 cents le litre) leur reviendrait à 18 cents.

L'année dernière, seules 220 000 personnes étaient concernées par cette subvention ; elles sont désormais près de deux millions, notamment plusieurs centaines d'habitants qui ont fui les combats à Kobané, une ville kurde de Syrie, ces dernières semaines.

IRIN a tenté sans succès à plusieurs reprises de joindre des fonctionnaires d'État pour recueillir leurs commentaires sur la question des subventions. D'après des sources haut placées aux Nations Unies, des négociations se sont déroulées en très haut lieu.

« S'il est trop tôt pour connaître. le nombre de familles qui seront touchées, toute réduction des subventions aura de graves conséquences sur ceux qui tentent de survivre à l'hiver prochain », a déclaré M. Colt. Comme plusieurs autres organisations humanitaires, le HCR a établi sa ligne budgétaire de carburant en fonction du prix subventionné.

Le 23 octobre, les Nations Unies ont lancé un appel aux dons de 2,2 milliards de dollars, afin de venir en aide à 5,2 millions de personnes qui ont besoin d'une « aide humanitaire d'urgence » en Irak au cours des 15 prochains mois.

Les personnes concernées par cette aide :
- 1,8 million de personnes déplacées depuis le début de l'année. Bon nombre vivent dans des tentes à l'intérieur des camps ou dans des abris en plein air. D'autres encore sont bloquées à l'intérieur des zones touchées par les conflits ;
- 1,5 million de personnes dont les communautés accueillent des familles déplacées et dont les structures locales comme les écoles ou les hôpitaux, ainsi que les réserves alimentaires, atteignent leurs limites ;
- 1,7 million de personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté et dans des zones non contrôlées par le gouvernement ;
- 215 000 réfugiés syriens vivant aussi bien à l'intérieur de camps qu'en milieu urbain dans la région semi-autonome du Kurdistan, dans le nord de l'Irak.

Le Plan de réponse stratégique (2014-2015) décrit les besoins en termes de denrées alimentaires et non alimentaires, d'abri, de protection, de santé, d'eau, assainissement et hygiène (WASH), d'éducation et de logistique jusqu'à la fin de décembre 2015. Le total de ces besoins s'élève à 2,2 milliards.

Jusqu'à présent, les Nations Unies ont reçu 600 millions de fonds nécessaires, dont un don unique de 500 millions de dollars de l'Arabie Saoudite.

« Les besoins du peuple irakien sont énormes », a déclaré Neill Wright, coordinateur humanitaire par intérim pour l'Irak. « Il est impératif de redoubler d'efforts. »

Le gouvernement irakien est appelé à réactiver les systèmes de distribution publics de nourriture et de soins médicaux. Il doit également verser leurs salaires à tous les fonctionnaires et autoriser l'achat de carburant au prix subventionné pour les PDIP et les réfugiés.

Depuis janvier, près de 1,8 million d'Irakiens ont fui l'avancée des extrémistes islamistes. En plein été, ils risquaient la déshydratation et l'insolation ; ils font désormais face à un hiver rigoureux accompagné de pluie et de neige. Les températures peuvent descendre jusqu'à moins 15 degrés en altitude.

D'après les estimations du Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA), en Irak, 800 000 personnes ont un besoin urgent d'abri et au moins 940 000 manquent de produits essentiels et d'articles ménagers.

Besoin de ressources supplémentaires

« Les efforts sont déjà bien engagés en préparation de l'hiver, mais il reste beaucoup à faire. Nous sommes particulièrement inquiets pour les déplacés qui vivent dehors », a déclaré dans un communiqué Neill Wright, coordinateur humanitaire par intérim pour l'Irak.

« Les autorités et les acteurs humanitaires ont un besoin urgent de ressources supplémentaires pour garantir une aide à un plus grand nombre de personnes. »

Actuellement, le HCR a seulement les capacités et les ressources nécessaires pour répondre aux besoins de 30 000 familles, soit environ 180 000 personnes, d'après le communiqué.

Bien qu'il varie d'une organisation à l'autre, le contenu des « kits d'hiver » inclut généralement des couvertures, des vêtements chauds, des chaussures, une bâche en plastique, un matelas, un panneau en contreplaqué, du matériau isolant, des réchauds à kérosène et des appareils de chauffage.

Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), qui avait également prévu de fournir des appareils de chauffage à base de kérosène à certains foyers pour enfants et écoles, essaye maintenant de se procurer des radiateurs à bain d'huile électriques.

L'UNICEF a également distribué plus de 5 000 kits contre l'hypothermie (contenant entre autres des couvertures, un matelas et une bâche en plastique) aux familles les plus vulnérables des camps de la province de Dohuk, dans la région semi-autonome du Kurdistan, dans le nord de l'Irak, l'une des régions de haute altitude les plus froides du pays.

Si les organisations humanitaires axent leurs programmes de préparation à l'hiver sur les PDIP, elles vont également procéder à une évaluation, afin de permettre aux réfugiés syriens les « plus vulnérables » de recevoir également des fournitures adaptées à une météo plus douce.

Selon l'UNICEF, 500 000 enfants déplacés ont besoin de vêtements d'hiver. L'organisation a fourni 223 000 kits - qui contiennent entre autres des bonnets, des écharpes, des bottes, des chaussettes, des gants et des pull-overs - mais il manque encore plus de 250 000 kits.

Lutte pour la survie

Hajar, qui n'a donné que son prénom, est une Kurde de la communauté shabak. Elle a fui son domicile à Bashiqa, une ville de la province de Nineveh près de Mossoul, car son père, un membre des forces armées kurdes, a été décapité par les extrémistes du groupe qui se fait désormais appeler l'État islamique (EI).

La jeune femme de 25 ans, enceinte de neuf mois, et son mari Sabah, un manoeuvre, ont déjà cinq enfants : un enfant de sept ans et deux paires de jumeaux de six et deux ans.

« Nous n'avons pas d'argent, pas de nourriture, pas de travail, pas de vie. Nous n'avons rien », a-t-elle déclaré. « L'hiver approche et cette tente est tout ce que nous possédons. Nous avons besoin de vêtements chauds pour les enfants et je m'inquiète pour mon bébé. »

Hajar est réfugiée au camp d'Harsham, une petite implantation réservée aux tests agricoles à Erbil, capitale du Kurdistan irakien. Le site, qui accueille près de 1 500 déplacés irakiens, appartient au ministère de l'Agriculture du gouvernement régional du Kurdistan. Il est géré par l'organisation non gouvernementale (ONG) ACTED. La responsable du site, Yasmine Colijn, a expliqué que, même si l'ONG faisait de son mieux pour offrir un certain confort aux PDIP, leurs moyens d'installation étaient limités.

« Comme il s'agit d'un site de tests du ministère de l'Agriculture, les socles en béton ne sont pas les bienvenus », a-t-elle affirmé, faisant référence aux fondations posées dans d'autres camps, afin d'avoir une surface plane qui permette de garder les tentes au sec. « Nous n'avons même pas de système de forage. Toute l'eau est transportée par autobus et versée dans un réservoir commun. »

Mme Colijn a indiqué que ACTED avait acheté des réserves de kérosène au prix du marché et avait organisé deux distributions jusqu'à présent. C'était juste une solution temporaire, a-t-elle expliqué. Elle espère que le gouvernement va bientôt clarifier la question des subventions.

« Je pense que toutes les organisations humanitaires sont en retard dans leurs programmes de préparation à l'hiver », a déclaré Mme Colijn. « Il semblerait que tout le monde a oublié l'hiver cette année. »

« Il y a eu très peu de préparation [interorganisations] à l'hiver, donc nous sommes très inquiets de ce qui va se passer », a déclaré un autre responsable d'une ONG, qui a souhaité garder l'anonymat.

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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