Entretien avec Mohamed Fall, l’administrateur du programme d’éducation de l’UNICEF

Alors qu’une nouvelle année scolaire démarre en septembre en République Démocratique du Congo (RDC), plusieurs écoles ne fonctionnent pas et la majorité des 67 000 professeurs d’écoles primaire et secondaire du pays sont en grève.

En août 2005, l’UNICEF a débloqué 3,3 millions de dollars américains pour réhabiliter les infrastructures scolaires et 3,25 millions pour fournir aux enfants scolarisés des cahiers, des stylos et du matériel didactique. Mohamed Fall, l’administrateur du programme d’éducation de l’UNICEF en RDC parle de cette aide dans une interview qu’il a accordé mercredi 7 septembre à IRIN et dont voici quelques extraits :

QUESTION : En quoi consiste l’aide que l’UNICEF accorde aux écoles en RDC ?

REPONSE : C’est un programme qui comporte plusieurs volets et qui a la particularité de s’adresser à près de 60% des enfants des écoles primaires, soit 3 250 millions d’enfants. Il touche également un peu plus de 50% d’enseignants du même niveau, soit autour de 67 000 instituteurs.

La priorité est donnée à l’achat de fournitures de base pour les élèves, de matériel didactique pour les enseignants, de fournitures de bureau pour les directions scolaires.

Le programme offre également un programme de formation continue pour les enseignants d’écoles primaires qui s’articule autours de trois modules. Le premier module s’articule autour de l’amélioration de l’environnement scolaire, à savoir la réhabilitation des infrastructures scolaires, la mise en place de points d’eau, la séparation des latrines des filles de celles des garçons. Le deuxième module porte sur le mobilier scolaire, c’est-à-dire sur l’achat de tableaux et de bancs.

Le troisième module consiste à aider le gouvernement à développer des activités d’information et de mobilisation sociale pour sensibiliser et inciter les parents à inscrire massivement leurs enfants à l’école.

QUESTION : Comment cette aide sera-t-elle répartie ? Quelles sont les écoles ciblées ?

REPONSE : En fait, l’aide comprend deux dimensions. La première dimension concerne l’accès aux écoles et cible essentiellement les enfants de première et de deuxième années, soit environ 2 850 000 enfants. Cette aide s’adresse au moins à 16 000 écoles publiques conventionnées et non conventionnées, réparties dans les 11 provinces du pays.

La seconde dimension du programme est plus spécifique et s’adresse à ce qu’on appelle les écoles ciblées dans le cadre de la coopération entre l’UNICEF et la RDC. Il y en a environ 2 000. L’UNICEF donne des fournitures scolaires à tous les élèves de ces écoles, de la première à la sixième année, ce qui représente environ un million d’enfants.

Nous dispenserons également une formation aux 22 000 enseignants de ces écoles, peu importe les classes dont ils ont la charge. Nous proposons une formation continue pour ces écoles. Nous participerons aussi à la réhabilitation des infrastructures, à la mise en place de latrines et de points d’eau. Nous fournirons du mobilier scolaire tout en recherchant l’adhésion de la communauté à nos programmes.

QUESTION : Comment vous organisez-vous sur le terrain ? Travaillez vous avec le gouvernement et des ONG ?

REPONSE : Nous travaillons en partenariat avec le gouvernement au niveau des structures centralisée et décentralisée.
Nous travaillons également avec les autorités religieuses dans les écoles catholiques, protestantes, kimbanguistes et coraniques. Nous avons signé des conventions avec tous ces établissements, au niveau national provincial et territorial. Nous collaborons aussi avec de nombreuses ONG internationales et locales qui aident l’UNICEF dans la distribution de fournitures scolaires.

QUESTION : Comment un tel programme peut-il fonctionner alors que les professeurs sont en grève ?

REPONSE : Nous savons que les enseignants sont en grève, et que des négociations sont déjà en cours. Nous espérons qu’une solution sera trouvée rapidement et qu’il n’y aura que deux à quatre jours de retour pour l’ouverture de l’année scolaire.

QUESTION : Quel est le montant de l’aide versée par l’UNICEF ?

REPONSE : L’aide sera d’environ 3,3 millions de dollars américains.

QUESTION : Quel est l’impact du programme de l’UNICEF ‘l’Education pour tous’ au niveau local ?

REPONSE : Nous avons noté près d’un million de nouveaux inscrits pour cette année scolaire, comparé aux effectifs de l’année dernière. Il y a 3,25 millions scolarisés pour l’année 2005-2006, contre 2,25 millions pour l’année 2004-2005. Nous avons également enregistré une progression de 20 000 enseignants par rapport à l’année dernière. En terme de chiffres, cela me paraît assez conséquent.
Nous avons aussi d’autres innovations, en terme de marchandise distribuée aux enfants, notamment.

QUESTION : Il y a deux ans, l’UNICEF a lancé un projet intitulé « toutes les filles à l’école ». Quels résultats avez-vous obtenu à ce jour ?

REPONSE : L’année scolaire 2005-2006 vient de commencer [donc je ne peux vous donner de résultats]. Cependant, si je prends l’exemple des inscriptions pour 2004-2005 – la première année -, nous avons observé une progression de près de 30% du nombre d’enfants inscrits. Et pour la première fois, nous avons enregistré une progression plus importante chez les filles que chez les garçons. La scolarisation des filles a connu une progression de 37% au niveau national, et celle des garçons, une progression qui s’établit entre 29 et 30%.

La progression dans les écoles ciblées se voit aussi dans les résultats scolaires. Ainsi, la proportion d’élèves ayant redoublé leur classe dans les écoles ciblées est plus faible que dans les autres écoles.