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« Mon mari savait depuis longtemps qu'il était infecté »

Lorsque Fatoumata Binta Diallo a découvert qu’elle était séropositive en 2001, son mari l’était déjà depuis plusieurs années mais ne lui avait rien dit, pas plus qu’à ses coépouses. Cette femme de 49 ans, veuve et mère de six enfants, est aujourd’hui présidente du REGAP+ (Réseau guinéen des associations de personnes infectées et affectées par le VIH/SIDA). Elle a raconté son histoire à IRIN/PlusNews.

« J’ai commencé à tomber malade en 2000. Comme mon mal persistait, en 2001 on m’a dit qu’il fallait faire un bilan médical et c’est là qu’on m’a dit que j’étais séropositive. J’ai pleuré, mon médecin traitant m’a réconfortée, il m’a donné des conseils et m’a dirigée vers [une association de personnes vivant avec le VIH].

« En 2003, je suis tombée vraiment malade, mais à cette époque, les antirétroviraux [ARV] en Guinée coûtaient 500 000 francs guinéens [98 dollars] par mois. Ce n’est qu’en 2004 que j’ai pu commencer un traitement, grâce à MSF–Belgique [Médecins sans frontières] qui le distribue gratuitement aux malades en Guinée.

« Mon mari est décédé en 2005. Il savait depuis longtemps qu’il était infecté mais jusqu’à sa mort, il ne l’a jamais dit. Un jour, en faisant le ménage, j’ai découvert des boîtes de médicaments vides cachées à la maison, je les ai apportées à mon médecin et il m’a dit que c’était des ARV. Comme mon mari gardait le secret, je n’ai rien dit non plus.

« Je savais que mon mari et moi avions le même médecin traitant, mais le médecin ne savait pas que c’était mon mari. Un jour, je suis venue faire des radios pour un début de tuberculose. Dans le bureau du médecin, de dos, j’ai reconnu mon mari qui avait rendez-vous aussi. J’ai reculé et je me suis cachée.

« Quand mon mari est reparti, le médecin m’a dit : ‘vous voyez ce monsieur ? Cela fait plus de cinq ans qu’il est [dépisté positif] et regardez comme il est gros’. Je lui ai demandé s’il était marié et si sa femme était au courant, il m’a dit ‘il a trois femmes mais je n’ai pas pu le convaincre de leur dire, il dit qu’il n’a pas les moyens de payer les médicaments pour elles et qu’il a peur [qu’elles le quittent], alors il garde le secret’.

« Mon mari était transporteur routier, il faisait les trajets vers la Guinée forestière [sud-est du pays]. Quand il est décédé, j’ai voulu rencontrer mes deux coépouses, qui vivaient à Kindia [à 135 kilomètres de Conakry].

« Le jeune frère de mon mari voulait m’épouser [selon la tradition du lévirat, répandue en Guinée, une veuve se remarie avec le frère de son défunt mari]. J’ai refusé et j’ai dit à une de mes coépouses qu’elle ne pouvait pas l’épouser non plus. Elle m’a demandé pourquoi, je lui ai expliqué, je lui ai dit qu’elle risquait de contaminer le frère de mon mari et ses trois épouses. Elle a répondu que c’était de la jalousie et elle l’a épousé. Une des femmes du frère de mon mari est déjà décédée.

« La troisième coépouse de mon mari s’est aussi remariée ailleurs. Récemment, j’ai vu son nom dans une association de personnes vivant avec le VIH dans la région où elle vit. Moi, je ne veux pas me remarier… sauf si je trouve une personne séropositive, ou séronégative qui comprend.

« J’ai dû déménager après la mort de mon mari. Le propriétaire de la concession m’a dit qu’il voulait tripler le loyer, c’était cher mais j’ai dit que je paierais, alors il a dit qu’il voulait deux ans de loyer d’avance. Sa nièce m’a expliqué que c’était seulement pour me faire partir, parce que les voisins savaient que j’étais infectée.

« J’ai adopté deux enfants, en plus de mes quatre. J’avais été hospitalisée une fois en même temps que leur mère [séropositive], et avant de mourir, elle m’avait fait promettre de faire tout ce que je pourrais pour ses enfants. Leur père s’est remarié et les a rejetés, je les ai pris avec moi.

« Avec les associations [du REGAP+], nous sensibilisons sur la question du test de dépistage et du préservatif. On fait aussi des témoignages à visage découvert.

« Une fois, un homme est venu me voir. Il était infecté, il voulait le dire à ses femmes mais il ne savait pas comment faire. Il voulait que je vienne parler du VIH avec elles, pour les préparer. Je suis venue, il posait des questions devant ses femmes et je répondais.

« Je l’ai revu après, il m’a dit que ses femmes voulaient que je les aide à aller se faire dépister. Je les ai emmenées, elles étaient toutes les deux séropositives et aujourd’hui, elles sont suivies. Si on n’avait pas tenu la rencontre, leur mari n’aurait pas eu le courage de leur dire ».

mc/ail


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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