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La pauvreté à l’origine des abus sexuels d’enfants dans le nord

En raison de l’extrême pauvreté qui touche les régions du nord de l’Ouganda, ravagées par deux décennies de conflit, les jeunes filles d’à peine 14 ans sont contraintes au mariage précoce et à la prostitution, selon un nouveau rapport rédigé par des organisations non gouvernementales (ONG) locales.

L’extrême pauvreté, le nombre important de foyers dirigés par des enfants et la grande mobilité des familles de déplacés internes sont autant de facteurs qui exposent les filles à la violence sexuelle et à la prostitution, d’après Gulu Support the Children Organisation (GUSCO) et Acholi Community Empowerment Network.

Les deux ONG, dont la mission consiste à porter assistance aux enfants touchés par le conflit armé, ont interrogé plus de 100 personnes entre décembre 2007 et février 2008, dans le cadre d’une étude réalisée suite à la découverte d’une importante augmentation du nombre de cas d’abus sexuels d’enfants rapportés dans les districts de Gulu et d’Amuru, dans le nord de l’Ouganda.

D’après les statistiques obtenues auprès des relevés judiciaires régionaux, quelque 1 300 jeunes filles auraient été victimes d’abus sexuels entre janvier et juin 2008 dans le nord du pays. En outre, les districts de Guru et d’Amuru enregistrent les taux d’incidents les plus élevés.

Dans le nord de l’Ouganda, des centaines de milliers de personnes déplacées, qui ont fui leur domicile au cours des deux décennies de guerre qui ont opposé les rebelles de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) et le gouvernement ougandais, vivent actuellement dans des camps « satellites », situés entre les camps de déplacés officiels et leurs villages d’origine, alors qu’elles tentent de reprendre possession de leurs terres.

De nombreux parents ont laissé leurs enfants dans les camps de déplacés officiels, afin que ceux-ci puissent continuer d’aller à l’école. « Sans la surveillance de leurs parents, ils [les enfants] sont vulnérables aux abus sexuels », peut-on lire dans le rapport.

Adultes à 16 ans

Contrairement aux normes juridiques internationales selon lesquelles un enfant devient majeur à l’âge de 18 ans, dans de nombreuses régions du nord de l’Ouganda, les filles sont considérées comme des adultes dès l’âge de 16 ans.

« Les familles forcent les filles à se marier dès qu’elles ont entre 15 et 18 ans pour des raisons économiques – la dot », toujours selon le même rapport. « Au-delà de 18 ans, elles sont considérées, dans certaines communautés, comme ‘oruta’ [qui signifie ‘usagées’ en langue locale acholi] ou ‘ogek’ [gaspillées]. »

Les personnes interrogées dans le cadre de l’étude ont également indiqué que les hommes recherchaient des partenaires sexuelles plus jeunes, car ils pensaient être ainsi moins exposés au VIH.

D’après le ministère de la Santé, le taux de prévalence du VIH/SIDA dans la région centrale du nord de l’Ouganda s’élève à 8,2 pour cent (le taux de prévalence national s’élève à 6,4 pour cent).

Bon nombre de jeunes filles, qui luttent pour se nourrir et se vêtir, se sont mises à traîner dans les bars locaux, dans l’espoir de rencontrer des soldats ou des hommes d’affaires.

« Mes parents sont morts, ils ont été tués par les rebelles, je me retrouve avec ce seul moyen de survie. Les clients des discothèques et des bars me permettent de gagner entre 5 000 shillings [trois dollars] et 8 000 shillings [cinq dollars] par jour », a confié une jeune fille de 15 ans, vivant à Gulu.

« Dans certains cas, des filles sont vendues dans des bars et elles sont contraintes à avoir des rapports sexuels contre de l’argent. Il arrive aussi que des hommes exploitent des jeunes filles qui travaillent comme baby-sitters à leur domicile », a expliqué Joseph Kilama, responsable de la protection de l’enfance dans le district de Gulu.

« Beaucoup de filles, qui travaillent illégalement comme serveuses dans des bars alors qu’elles sont encore mineures, ont indiqué avoir été victimes d’abus sexuels par des clients en état d’ébriété », a-t-il poursuivi.

D’après les résultats de l’étude, parmi les auteurs d’abus sexuels d’enfants figurent des travailleurs humanitaires, des hommes d’affaires, des paysans, des enseignants, des membres de famille, des hommes armés, tels que des membres de la LRA et des soldats des Forces de défense du peuple ougandais.

« Cette région est aux prises avec un conflit et les enfants sont constamment victimes d’abus sexuels et psychologiques », a expliqué Phenihensas Arinaitwe, chef des forces de police régionales.

Il a précisé que la police recevait quotidiennement au moins cinq rapports d’abus sexuels d’enfants.

Des systèmes de rapport des cas d’abus plus performants

Les chercheurs ont conclu qu’une sensibilisation croissante aux abus sexuels d’enfants et aux dangers du VIH avait contribué à une récente augmentation du nombre de crimes rapportés à la police. En effet, les abus sexuels d’enfants étaient en règle générale sous-rapportés.

« Les actuelles campagnes de sensibilisation au VIH/SIDA, qui font également la promotion des services de prévention destinés aux victimes de viols et d’abus sexuels, ont également encouragé les populations à déclarer plus régulièrement les cas d’abus sexuels », a noté le rapport.

De nombreux médecins exigent une déclaration de police avant de prescrire à un patient une prophylaxie post-exposition. Cette démarche est également à l’origine de l’augmentation du nombre de cas d’abus sexuels d’enfants rapportés à la police.

« Les personnes interrogées dans le cadre de l’étude ont souligné les répercussions positives de la participation communautaire dans la promotion de la sensibilisation des droits des victimes et des procédures de rapport des cas d’abus », a ajouté le rapport. « Cela inclut le rôle des leaders locaux, des parents des victimes et des forces de police spéciales bénévoles... La plupart du temps, les gens sont plus susceptibles d’écouter les personnes qu’ils connaissent et auxquelles ils font confiance ».

« Peu de cas sont portés devant le juge », a encore noté le document. « Et ce, pour de multiples raisons. Par exemple, certains parents utilisent la plainte déposée à la police comme moyen d’extorquer de l’argent aux auteurs des crimes ».

ca/kr/he/kn/cd/ail


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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