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« Crimes d’honneur », un soupçon suffit

En Jordanie, un quart des meurtres de femmes accusées d’adultère repose uniquement sur des soupçons ; et seules 15 pour cent des victimes sont tuées après que l’adultère a effectivement été prouvé, selon les conclusions d’une étude publiée par le Fonds de développement des Nations Unies pour la femme (UNIFEM).

L’étude a été présentée le 25 novembre à l’occasion de la campagne mondiale des Nations Unies baptisée ‘Seize jours d’activisme contre la violence envers les femmes’, organisée par l’UNIFEM.

Que les victimes s’avèrent vierges ou non ne semble guère peser sur les peines prononcées à l’encontre des auteurs de ces violences : les meurtriers sont souvent condamnés à des peines de six à 12 mois, conformément à la jurisprudence.

Cette étude, élaborée pour faire la lumière sur les « crimes d’honneur », un phénomène social important en Jordanie, contenait plusieurs témoignages de meurtriers et de victimes de violence.

« Ils m’ont mise dans la chambre d’amis et tout le monde a commencé à suggérer différentes manières de me suicider. Même ma tante a dit que tout le monde devrait sortir de la maison et me laisser ouvrir une bombonne de gaz et me tuer. Mon frère a suggéré que je me pende avec une corde. J’ai tenté de m’enfuir, mais je n’ai pas pu. Ils m’ont gardée enfermée dans une armoire sous la cage d’escalier et me donnaient un petit peu de nourriture tous les quatre ou cinq jours. J’ai même appelé les voisins pour qu’ils me donnent à manger, parce que ça ne suffisait pas. Un jour, mon frère m’a emmenée dans une zone déserte et a commencé à me lapider », a confié une jeune fille que sa famille a tenté de tuer, la soupçonnant d’être tombée enceinte hors mariage.

Le frère de la victime l’a violemment battue et blessée à coups de couteau avant de la laisser pour morte dans une zone abandonnée, près du camp de réfugiés de Baqaa.

Un phénomène urbain ?

Selon l’étude, la plupart des crimes « d’honneur » ont été commis dans les plus grandes villes du royaume et non dans les zones rurales, qui normalement sont principalement peuplées par des communautés conservatrices.

Entre 2000 et 2003, pas moins de 36 cas de meurtres ont été signalés à Amman, 17 à Irbid (situé à 120 kilomètres au nord d’Amman), 13 à Balqa (30 kilomètres à l’ouest d’Amman) et 11 à Zarqa (30 kilomètres à l’est d’Amman).

En revanche, seuls deux crimes ont été perpétrés dans la ville conservatrice de Maan, près de la frontière saoudienne, et trois à Tafelah (200 kilomètres au sud d’Amman).

Les statistiques indiquent également que 45,1 pour cent de ces crimes ont été commis par les frères des victimes, 15 pour cent par les maris et 14 pour cent par un membre de la famille proche.

Toujours d’après l’étude, au moins 97 femmes ont été tuées pour des « questions d’honneur » ou dans le cadre de querelles familiales en 2000-2003.

La princesse Bassma, tante du roi Abdallah de Jordanie et défenseuse des droits de la femme, a déclaré, au cours de la cérémonie qui marquait la publication de l’étude, que la violence contre les femmes n’était pas uniquement source de souffrances et de traumatisme pour les victimes, mais qu’elle affectait également leurs familles et la société dans son ensemble.

« Ces souffrances revêtent différentes formes – la peur, la privation arbitraire de la liberté de prendre part aux vies privée et publique, et les souffrances psychologiques et physiques », a-t-elle expliqué.

Selon les conclusions de l’étude, dans au moins 63,3 pour cent des cas, les familles des victimes retirent les plaintes déposées contre les auteurs des violences ; il devient alors d’autant plus facile pour les meurtriers d’obtenir la peine la moins lourde.

Les activistes des droits humains font pression pour que le code pénal soit amendé de sorte que les auteurs de « crimes d’honneur » soient passibles de lourdes peines, mais leurs efforts se sont heurtés jusqu’ici à la résistance farouche des politiciens conservateurs.

Outre les « crimes d’honneur », l’étude portait sur la violence contre les femmes dans son ensemble. Selon ses conclusions, entre 2000 et 2003, près de 25 femmes sont mortes des suites de maltraitances physiques infligées par des membres de leur famille.

mbh/ar/cb/nh/ads/ail


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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