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Que se passe-t-il à Kerem Shalom ?

Gaza authorities registering trucks entering Rafah after retrieving imports from Kerem Shalom Erica Silverman/IRIN
Kerem Shalom étant actuellement l’unique point d’entrée permettant l’acheminement de marchandises commerciales et humanitaires d’Israël à Gaza, il est devenu la planche de salut de la Bande ; mais comment fonctionne-t-il ?

Kerem Shalom, petit point de passage dépourvu des installations nécessaires au passage d’un grand nombre de camions, se trouve en Israël, à trois kilomètres de la ville gazaouie de Rafah, située à la frontière égyptienne.

Seuls à avoir été autorisés par Israël à se rendre en personne à Kerem Shalom, les employés de la société Shaiber, une entreprise privée gazaouie, viennent y chercher des marchandises d’importation. La société n’a pas souhaité s’exprimer.

Les autorités gazaouies, quant à elles, ne peuvent pas se rendre à Kerem Shalom. Les camionneurs israéliens déchargent des palettes de marchandises dans une zone ouverte et repartent, puis les camionneurs palestiniens de Gaza viennent chercher ces marchandises, selon Ghazi Hamad, haut responsable du Hamas, et les commerçants de Gaza.

Les autorités israéliennes expliquent qu’elles utilisent Kerem Shalom depuis la fermeture du point de passage de Karni, bien plus grand et mieux équipé, à la suite d’attentats, commis par des Palestiniens à Karni et qui avaient coûté la vie à plusieurs soldats israéliens, il y a quelques années.

Aucun contact

« Il n’y a aucun contact entre le gouvernement Hamas et les autorités israéliennes », a expliqué Mohammed Shaer, responsable principal des douanes de Gaza, stationné à Rafah, ajoutant : « Il y a encore quelques représentants des Autorités palestiniennes (AP) à Ramallah, qui tentent de faire la liaison entre le gouvernement de Ramallah [en Cisjordanie] et Israël pour permettre l’acheminement de marchandises dans Gaza ».

« Kerem Shalom est entièrement contrôlé par Israël. Cette année, Gaza n’a exporté, en tout et pour tout, que cinquante cargaisons d’œillets »
Il n’y aucun contact non plus entre le ministère gazaoui des Finances et les ministères concernés sous l’autorité des AP à Ramallah, selon M. Shaer.

« Kerem Shalom est entièrement contrôlé par Israël », a commenté M. Al-Bayari, représentant de terrain du Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA). « Cette année, Gaza n’a exporté, en tout et pour tout, que cinquante cargaisons d’œillets ».

Le point de passage n’est pas éclairé et les containers sont interdits par Israël du côté palestinien de Kerem Shalom, selon le groupement logistique, dirigé par le Programme alimentaire mondial.

« On ne peut pas assurer un service de nuit à Kerem Shalom. Si l’on éclaire l’endroit, des snipers pourront en profiter pour tirer sur le point de passage », a déclaré à IRIN Shlomo Dror, ministre israélien de la Défense.

« A Kerem Shalom, il n’y a pas de contact [physique] : on met toute la marchandise en place, puis les Palestiniens viennent la récupérer ».

Contrôle des marchandises importées à Rafah

Des camions palestiniens vides font la queue de Rafah à Kerem Shalom, dans l’attente d’aller chercher les marchandises que les autorités israéliennes leur permettront d’acheminer dans Gaza.

Une fois chargés, les camions gazaouis repartent tranquillement vers Rafah, où les représentants des autorités gazaouies procèdent à l’admission des marchandises. Les autorités ne disposant d’aucun scanner, les responsables vérifient les documents de bord de chaque camion et sa cargaison.

The entrance point for passengers and vehicles inside Rafah crossing on the Palestinian side
Photo: Erica Silverman/IRIN
Point d’entrée des passagers et des véhicules au point de passage de Rafah, du côté palestinien
Les commerçants palestiniens payent des impôts à Israël, et le gouvernement gazaoui prélève une taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de 14,5 pour cent sur les marchandises, a expliqué M. Shaer.

Gaza et la Cisjordanie ne forment qu’une seule et même zone douanière aux yeux des autorités israéliennes, qui prélèvent des taxes douanières et sont censées les reverser chaque mois aux AP, à Ramallah, conformément au protocole de Paris, signé conjointement avec les accords d’Oslo, en 1994.

Importations retardées

Un grand commerçant de Gaza-Ville, qui a préféré conserver l’anonymat, a dit importer essentiellement du matériel électronique via Kerem Shalom, « les chaussures et les vêtements n’étant pas autorisés à l’importation ».

« Les produits restent au point de passage pendant des semaines, exposés à l’environnement », a expliqué le commerçant. « La marchandise est souvent endommagée et les différentes palettes sont jetées par terre, toutes ensemble. Il faut compter au moins un mois pour que la marchandise puisse passer dans Gaza ».

« Le gouvernement de Ramallah travaille avec les autorités israéliennes pour assurer que je puisse importer des produits pharmaceutiques à Gaza », a expliqué Nader Shurrab, propriétaire de la Société centrale de Gaza, premier importateur de produits pharmaceutiques de la Bande.

Il faut à Nader Shurrab quatre à six semaines, a-t-il dit, pour obtenir un rendez-vous avec les autorités israéliennes, afin d’obtenir l’autorisation d’envoyer ses camions à Kerem Shalom pour y chercher ses produits pharmaceutiques importés. « Cinquante pour cent du temps, mes camions doivent faire demi-tour ».

Cinq points de passage permettent de se rendre à Gaza : quatre à la frontière israélienne et un à la frontière égyptienne. Rafah et Erez sont des points de passage réservés aux personnes ; Nahal Oz est réservé aux importations de carburant ; et le tapis roulant de Karni ne sert qu’au blé et au fourrage.

Trente-deux types de produits autorisés à l’importation

A la mi-avril, les autorités israéliennes autorisaient l’importation de 32 types de produits à Gaza, selon le Palestine Trade Centre (PalTrade), à Gaza.

En avril, selon le Coordinateur des activités du gouvernement dans les territoires (le COGAT, sous l’autorité du ministère israélien de la Défense), 92 pour cent des marchandises autorisées à l’importation dans Gaza via le point de passage de Kerem Shalom étaient des produits alimentaires et d’hygiène.

Le matériel de construction, les pièces détachées, les intrants agricoles (y compris le bétail) et le matériel IT figurent sur la liste des produits interdits, selon OCHA.

« Les livraisons sont désorganisées et irrégulières, et parfois, certains produits sont interdits », a expliqué M. Shaer. « Cela fait six mois que ni des chaussures, ni du bois n’ont pu être importés à Gaza, et aucune importation de bétail n’a été autorisée depuis septembre 2008 ».

The area inside Rafah crossing on the Palestinian side. The open door leads to scores of tunnels, located on the other side of the wall, used to smuggle basic food items and supplies from Egypt into Gaza
Photo: Erica Silverman/IRIN
La zone située à l’intérieur du point de passage de Rafah, du côté palestinien. Cette porte s’ouvre sur une multitude de tunnels, servant à faire passer des denrées alimentaires et autres en contrebande de l’Egypte vers Gaza
Décision du cabinet israélien


Le 22 mars, le cabinet israélien a décidé de lever les restrictions d’importation imposées sur les produits alimentaires, mais cette mesure n’a pas encore été mise en place, selon le groupement logistique.

« Les restrictions imposées sur les types de produits alimentaires autorisés à l’importation [à Gaza] ont été levées, mais la question porte désormais sur le nombre de camions pouvant passer [via Kerem Shalom]. Il y a une cinquantaine d’employés civils au point de passage [de Kerem Shalom], dont les camionneurs, et il est bien plus facile de les protéger la journée. Mettre en service le point de passage est un risque calculé ...Avant la dernière opération [du 27 décembre 2008 au 18 janvier 2009], des Qassams avaient été tirées [par les militants palestiniens] dans la région, et après l’opération, il y a eu, à plusieurs reprises, des tirs de mortier et des tirs de sniper dans la zone [à Kerem Shalom] », a néanmoins déclaré M. Dror, porte-parole du gouvernement israélien, pour souligner l’importance des questions de sécurité.

De « graves pénuries »

« Plus de 90 pour cent des industries de Gaza ont cessé leurs activités en raison du peu d’importations, qui a provoqué de graves pénuries de produits alimentaires et autres denrées essentielles », selon M. Hamad du Hamas ; M. Hamad n’a cependant pas évoqué les dizaines de tunnels illégaux creusés entre l’Egypte et Gaza, qui ne permettent toutefois de faire passer qu’une quantité limitée de produits, en partie du fait des mesures de répression appliquées par les autorités égyptiennes et des dégâts causés par les forces de sécurité israéliennes.

« Le matériel médical a la priorité à l’importation dans Gaza ; viennent ensuite les produits alimentaires acheminés par les organismes internationaux. Le gouvernement a pris la décision de ne pas laisser une crise humanitaire se produire à Gaza », a déclaré M. Dror, porte-parole israélien, ajoutant : « Les Palestiniens viennent nous voir pour nous demander [d’autoriser l’importation de certains produits à Gaza] et nous déterminons si c’est nécessaire (par exemple, dans le cas du fourrage, nous avons autorisé qu’il soit importé, bien que ce ne soit pas absolument nécessaire) ».

« Les autorités israéliennes autorisent l’entrée à Gaza de 80 à 110 camions par jour via Kerem Shalom », selon M. Hamad, bien que jusqu’à la victoire électorale du Hamas à Gaza, en juin 2007, environ 475 camions arrivaient chaque jour d’Israël à Gaza, selon OCHA.

« En mars et avril, 33 pour cent des camions entrés dans Gaza transportaient de l’aide humanitaire pour le compte de l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens [UNRWA] et d’autres organisations humanitaires internationales, et environ 70 pour cent [des camions transportaient de la marchandise] pour le secteur privé », selon M. Al-Bayari. « La quantité d’aide humanitaire a augmenté après la guerre, et elle est désormais en train de diminuer ».

Le point de vue des Israéliens est quelque peu différent : « Le nombre de camions transportant de l’aide humanitaire est resté constant en mars-avril. Il n’y a pas de pénurie d’aide humanitaire, ni d’autres produits à Gaza … La situation peut changer, mais cela dépend du Hamas ; il faut qu’ils reconnaissent qu’ils sont responsables de s’occuper des civils », a déclaré M. Dror à IRIN.

es/at/cb/nh

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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